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Vayéhi, la fin d’un livre

par: Jaqui Ackermann

Publié le 4 Janvier 2023

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La fin d’un livre

La fin d’un livre de la thora est toujours empreinte d’un sentiment particulier. On a envie de sentir que quelque chose se termine « bien ». Mais cela est difficile à formuler pour béréchith où la fin termine par le décès de Yosséf. Qu’est-ce qui est « bien », quand on sait qu’en vérité, cela amorce, petit à petit ce fameux exil d’Egypte ? Il n’empêche que ce livre de béréchith est d’abord pour nous le livre des Patriarches, fondateurs du peuple. En soi, cette base est notre fierté. Le prophète Bil’am a dit : je ne peux pas les maudire, je les vois du haut des rochers. Le midrach dit que ces rochers font allusion aux Patriarches (et les « collines » qui suivent, font allusion aux Matriarches). Cela empêche la malédiction. Et Bil’am dit : j’aimerais mourir comme eux, comme les Patriarches. Cette amorce par les Patriarches est un début d’éternité. En terminant ce livre, le sentiment doit être que les bases sont posées. Il faut maintenant construire la suite. Le décès de Yosséf ne signifie pas qu’il faille pleurer un passé glorieux, mais au contraire, qu’il faut l’intégrer pour continuer à édifier au-dessus. C’est le dernier message de Yosséf : D. vous rappellera. Le défi est là : comment continuer en ne méprisant pas un seul élément de ce passé valeureux ? Comment être totalement épanoui en tenant compte de tout ce qui a été réalisé auparavant ? L’homme a toujours cherché à « faire mieux », mais avec un petit sentiment que s’il fait mieux, c’est qu’auparavant, ce n’était pas convenable à 100%. Nous ne pouvons pas fonctionner comme cela. Qui peut oser dire qu’il fait mieux qu’Avraham ? Avraham n’avait pas de thora, mais nous l’avons reçue et sommes obligés de la suivre. Sommes-nous meilleurs alors ? La question n’est pas là. Nous continuons à notre manière, mais nous savons que c’est la suite de ce qu’Avraham a commencé. La thora nous permet, même si on ne sait pas comment cela fonctionne, un épanouissement dans le présent, sans le mépris du passé. Quand chacun réalise ses devoirs de son mieux, il valorise aussi bien son propre devenir, que tout l’édifice qui a été construit avant lui.

Que fallait-il dire ?

Même les enfants connaissent ce midrach : Yaakov a voulu « dévoiler » la fin des temps, mais en a été empêché. Effectivement le verset parle de la « fin des jours ». Et rien n’est clairement dit par la suite à ce sujet. Cela va donc dans le sens du midrach. Mais cela n’explique pas quelles étaient les intentions de Yaakov (D’ailleurs, le midrach dit la même chose sur Yits’hak qui a voulu dévoiler cela à Essav – on a la fâcheuse habitude de raconter du midrach sans en donner aucun sens.) Il ne s’agit pas de donner une date, la fin des temps n’exprime pas par une date magique qui va transformer le monde en un énorme paradis. Imaginer cela ou tout ce qui est de cet ordre, relève d’enfantillages et d’inepties. Il s’agit pour Yaakov, à travers ses bénédictions, de donner des forces (et non des prédictions), de « faire venir » d’En-Haut, comme savent le faire les prophètes, une aide divine que permettra d’envisager avec sérénité la suite de l’histoire. Connaître la fin des temps, c’est être prêt, avoir toutes les capacités pour supporter facilement ce qui se passe jusqu’à ce moment. Finalement, Yaakov n’a pas été inactif, puisque le verset dit qu’il en a parlé ! Le verset ne ment pas. En vérité, Yaakov a, à mots cachés, donné des éléments à ses enfants pour supporter, un peu, les méandres de l’histoire, les hauts et les bas, jusqu’à la fin des temps ; Ses bénédictions ont un peu aidé ses fils à supporter. Sans elles, cela aurait été bien plus dur, voire impossible. Il faut donc étudier ces bénédictions dans cette optique, comme une aide partielle à développer des capacités qui nous mèneront à terme. Yaakov veut dépasser tous les problèmes qui se sont passés entre les frères, qu’il devine par prophétie ou qu’il connait. Il veut donner les forces d’aller au-delà de ces dissensions. Mais D. lui fait comprendre qu’on n’en est pas encore à ce niveau. Alors Yaakov, exprime à travers ses mots, qu’effectivement, il y a des manquements pour certains, mais que cela sera rattrapé par d’autres (inspiré du Beth Yaakov).

Yosséf a-t-il pardonné ?

Il n’est pas marqué clairement que Yosséf a pardonné à ses frères (voir rabénou Ba’hyé béréchith 50,17). Ils se sont réconciliés, Yosséf a fait un pas vers eux lorsqu’il se montre à eux et les tranquillise (45,15). On se serait attendu à les voir lui parler du passé, à lui dire qu’ils l’ont profondément regretté. Certes, ils se jettent à ses pieds plus tard (seulement après la mort de leur père), en lui demandant pardon. Mais lui, il élude le problème. On ne voit pas une parole d’explication, de mise au point, etc. Yaakov n’a pas semblé vouloir faire la paix entre eux ou a imaginé qu’elle existait. En tous cas, le texte n’exprime pas d’intervention claire de sa part. On ne peut pas dire grand-chose sur ces sujets, les textes ne sont pas très clairs. C’est une épreuve pour nous qui voulons comprendre. Nous faisons confiance à D., Sa thora est parfaite, même s’il y a des passages obscurs pour nous. La dispute entre ces frères est incompréhensible : comment des hommes de cette valeur peuvent en venir à de tels comportements ? Comment Yaakov « laisse faire » ? Certes, nous savons que nous ne pouvons pas juger tant que nous ne sommes pas clairement instruits de tous les éléments de l’époque, nous restons donc avec des interrogations. Il reste une évidence. La place de chacun, au sein de la famille est un travail, un sérieux défi. Il ne s’agit pas simplement d’organiser des enfants entre eux mais de donner à chacun son véritable rôle spirituel, qu’il se l’approprie, et qu’il reconnaisse celui des autres comme complémentaires. Le peuple juif travaille dans cette voie depuis des siècles, et nous devons apporter notre pierre à cet édifice.

Pour en finir avec des idées fausses Peut-on étudier ce qu’on veut ?

Certains imaginent qu’on peut étudier ce qu’on veut, comme cela vient. Notre thora ne fonctionne pas comme cela. Il y a des obligations « primaires ». D’abord, on doit connaître les principaux actes quotidiens, ou ce qu’on risque de rencontrer au quotidien. On doit apprendre les principales règles de la prière, du chabath, des fêtes, des obligations sociales, des obligations qui concernent la maison, les vêtements, les achats, la kachrouth, tistsith, téfiline, etc., les moments comme la circoncision, le rachat des premiers nés, le mariage, etc. On doit être attentif aux questions de statuts de la personne, aux règles des synagogues. On doit savoir gérer les relations avec les non-juifs. On doit pouvoir énoncer les principes auxquels nous croyons et ne pas croire n’importe quelle idéologie, quelle que soit son origine. Tout cela doit être entretenu et affiné, au fur et à mesure qu’on grandit. Finalement, c’est un ensemble assez large, mais qu’on peut imaginer comme un ensemble fini. Il existe une autre obligation de fond. Le talmud dit que chaque père doit enseigner à son fils toute la thora écrite (cette obligation ne concerne que les garçons, pas les filles). Les décisionnaires discutent à savoir si cela inclut toute la bible ou uniquement le pentateuque. Même si on se limite au deuxième avis, cela implique qu’il faut régulièrement lire et comprendre ce qu’y est inscrit (en étudiant la paracha de la semaine dans le texte par exemple). Cela n’est pas « la cerise sur le gâteau », mais une stricte obligation. Pratiquement, on n’enseigne pas cela à son enfant, mais on se borne à lui donner les moyens de l’apprendre seul, ce qui est aussi une manière de réaliser son obligation. Mais cette obligation, si elle n’a pas été remplie par le père, pèse toujours sur le dos de chacun. Même si on ne comprend pas tout ou qu’on a une foule de questions, il est néanmoins obligatoire de lire et relire le ‘houmach, de questionner, d’approfondir, et de tenter d’y puiser des connaissances, des principes et d’en faire sa référence. On n’est pas exempté de poser des questions quand on ne comprend pas, au contraire, il faut chercher le maximum de réponses, selon ses possibilités, pour satisfaire ses besoins de connaissances. A bon entendeur, salut.

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