Nombreux sont les thèmes qui peuvent être abordés dans ces deux dernières parachiot du livre de Chemot.
Les différences entre la description du tabernacle avant et après la faute du veau d’or, l’intrication du Chabat dans l’exécution de la construction du tabernacle, la nomination et la spécificité de la personne de Betsalel le constructeur du tabernacle, les habits du grand prêtre, l’apport des matériaux et leur élaboration …
La fabrication des tapis qui recouvraient la tente d’assignation est assez étonnante car la conception de ces pièces incombait aux femmes. Elles n’ont réalisé que cela.
פרק לה
כה׃ וכל אשה חכמת לב בידיה טוו ויביאו מטוה את התכלת ואת הארגמן את תולעת השני ואת השש
Toutes les femmes habiles filèrent elles-mêmes et apportèrent tout filés l’azur, le pourpre, l’écarlate et le lin
כו׃וכל הנשים אשר נשא לבן אתנה בחכמה טוו את העזים
Et toutes les femmes que leur cœur portait à la sagesse, filèrent le poil de chèvre
Le Rambam relève que le terme « sagesse » ici est à traduire dans le sens de la possession d’un art ou d’une industrie (dernier chapitre du Guide des égarés). « Que leur cœur portait à la sagesse » est donc à comprendre dans le sens où des esclaves qui ont été soumis à des travaux grossiers n’ont pas pu apprendre un tel art, d’artistes égyptiens. Il fallait donc pour le développer une sensibilité et une intuition extrême au matériau, à ses propriétés, à ses limites mais aussi à sa propre imagination. L’art, nécessaire à la construction du tabernacle, relève donc du dépassement littéral de soi.
Rachi relève une difficulté de langage dans le verset:
רש »י על שמות פרק לה פסוק כו
טוו את העיזים – (שבת צט) היא היתה אומנות יתירה שמעל גבי העיזים טוין אותן
Elles filèrent le poil de chèvre (littéralement « elles filèrent les chèvres): Il s’agit d’un travail d’expert dans l’art du tissage du poil de chèvre qui se faisait sur le corps de l’animal.
Les sources de Rachi se situent dans deux textes du traité Chabat (99a et 74b)
תלמוד בבלי מסכת שבת דף צט/א
תנו רבנן יריעות התחתונות של תכלת ושל ארגמן ושל תולעת שני ושל שש ועליונות של מעשה עזים וגדולה חכמה שנאמרה בעליונות יותר ממה שנאמרה בתחתונות דאילו בתחתונות כתיב וכל אשה חכמת לב בידיה טוו ואילו בעליונות כתיב וכל הנשים אשר נשא לבן אתנה בחכמה טוו את העזים ותניא משום רבי נחמיה שטוף בעזים וטווי מן העזים
Les sages ont enseigné: les tentures du dessous [de la tente d’assignation] étaient faites en (laine) azur, pourpre, écarlate et lin fin. Les tentures du dessus [de la tente d’assignation] en poil de chèvre. Grande était l’expertise nécessaire à la fabrication des tentures du dessus plus que celle nécessaire à la fabrication des tentures du dessous parce qu’il est dit pour les tentures du dessous « Toutes les femmes habiles filèrent »(verset 25), alors que pour celles du dessus il est dit: » Toutes les femmes que leur cœur portait à la sagesse filèrent les chèvres »(verset 26). Rabbi Né’hemia dit: le poil était lavé sur les chèvres mais tissé à partir du poil de chèvre [coupé].
Le Maarcha explique qu’il était nécessaire de filer le poil de chèvre sur le dos des animaux pour des questions d’impureté, car un être vivant n’est pas susceptible de devenir impur.
Rabbi Né’hemia lui même s’est finalement rallié à l’opinion de ses collègues.
תלמוד בבלי מסכת שבת דף עד/ב
אמר רבה בר בר חנה אמר רבי יוחנן הטווה צמר שעל גבי בהמה בשבת חייב שלש חטאות אחת משום גוזז ואחת משום מנפץ ואחת משום טווה רב כהנא אמר אין דרך גזיזה בכך ואין דרך מנפץ בכך ואין דרך טווי בכך ולא והתניא משמיה דרבי נחמיה שטוף בעזים וטוו בעזים אלמא טוויה על גבי בהמה שמה טוויה חכמה יתירה שאני
Rabba bar bar ‘Hana dit au nom de Rabbi Yo’hanan: Celui qui tisse de la laine sur le dos de l’animal le Chabat est condamnable à trois titres: tondre, carder, tisser. Rav Kahana relève on ne tond pas ainsi, on ne carde pas ainsi, on ne tisse pas ainsi (n’est condamnable que celui qui agit de manière habituelle). Vraiment (dit-on à Rav Kahana) ! Pourtant, il est enseigné au nom de Rabbi Né’hémia: le poil de chèvre fut lavé et tissé sur les chèvres (la Torah parle de choses normales même si elles sont exceptionnelles), alors un tissage sur l’animal est condamnable. Non, il s’agit d’une expertise exceptionnelle et cela est différent (et non condamnable).
Les femmes n’ont participé à la construction du Tabernacle que par le tissage et rien d’autre. Rabbenou Be’hayé remarque qu’elles ne sont capables que de cet art.
רבינו בחיי על שמות פרק לה פסוק כה
וכל אשה חכמת לב בידיה טוו – מכאן שאין ראוי להיות חכמת האשה אלא במטוה ובזריזות צרכי ביתה וכבוד בעלה, ולכך מנעו רז »ל ללמד תורה לבנות שנאמר דברים ו) ושננתם לבניך ולא לבנותיך ואמרו כל המלמד את בתו תורה כאלו מלמדה תפלות)
Toutes les femmes que leur cœur portait à la sagesse filèrent: De là, il n’est possible de parler d’art pour une femme que dans le domaine du tissage, dans l’attention qu’elle porte à sa maison et à l’honneur qu’elle donne à son mari. Ainsi les sages se sont retenus d’apprendre la Torah à leurs filles comme il est dit « tu l’enseigneras à tes fils » et non à tes filles. Ils ont dit de plus: tout celui qui enseigne la Thora à sa fille, il lui enseigne des choses secondaires (obscènes).
L’expression תמלמדה תיפלו « lui enseigne des choses secondaires » est bien connu, c’est Rabbi Eliezer qui l’énonce dans Sota 21b (voir aussi Yérouchalmi Sota 5,4 qui ne manque pas de piquant). Rabbi Eliézer récidive dans Yoma 66b:
שאלה אשה חכמה את רבי אליעזר מאחר שמעשה העגל שוין מפני מה אין מיתתן שוה אמר לה אין חכמה לאשה אלא בפלך וכן הוא אומר וכל אשה חכמת לב בידיה טוו איתמר רב ולוי חד אמר זיבח וקיטר בסייף גפף ונישק במיתה שמח בלבבו בהדרוקן וחד אמר עדים והתראה בסייף עדים בלא התראה במיתה לא עדים ולא התראה בהדרוקן
Une femme sage demanda à Rabbi Elièzer: Puisque tous ont participé de la même manière à la faute du veau d’or, pourquoi la mort n’a pas été la même pour tous ? Il lui a répondu: une femme n’a de connaissance que pour la quenouille, comme dit: « Toutes les femmes habiles filèrent elles-mêmes ». Sur cette question (de la femme sage) Rav et Lévi s’opposent: l’un dit ceux qui sacrifièrent ou offrirent l’encens (au veau d’or), sont condamnés à mort par l’épée, ceux qui enlacèrent et embrassèrent (manière inhabituelle d’idolâtrer mais très maternelle), sont condamnés à mort par l’épidémie et ceux qui se réjouirent et approuvèrent, sont condamnés à voir leur ventre gonfler et exploser. L’autre dit: ceux qui ont été avertis et vus par des témoins sont condamnés à mort par l’épée, ceux qui ont été vus sans être avertis, sont condamnés à mort par l’épidémie et ceux qui n’ont pas été vus ni avertis, sont condamnés à mort par gonflement et explosion.
Pourquoi Rabbi Eliezer ne répond pas à cette femme, pourtant sa question était légitime puisque Rav et Lévi ont traité la question ? Plusieurs réponses à cette question:
- 1) Dans la guémara, plusieurs questions ont été posées à Rabbi Eliézer, à chaque fois, il ne répond que s’il a reçu la réponse de ses maîtres. Ici aussi il n’avait pas reçu de réponse de ses maîtres, c’est pour cela qu’il n’a pas répondu à la femme sage (Maharetz ‘Hayout, Guéonim). Cependant cela ne justifie pas pourquoi il dénigre cette femme, en la renvoyant à ses quenouilles au moyen d’un verset.
- 2) Suivant sa position dans Sota 21b, Rabbi Eliezer s’abstient d’enseigner à une femme un enseignement de Thora à une femme. Alors, pourquoi lui enseigne-t-il qu’elle devrait plutôt aller tisser que de se poser des questions de Thora ?
- 3) Rabbi Eliezer avait autre chose à faire que de passer du temps à répondre à une femme (Meïri)
- 4) Il me semble que Rabbi Eliezer ne voulait pas répondre à cette femme parce qu’il ne voulait pas approfondir le jeu des questions/réponses avec elle. Il esquive la confrontation et lui donne une loi simple et tranchée « la sagesse des femmes s’exprime dans le tissage « . Que veut-il lui enseigner par cela ?
Tout d’abord, il est évident que les femmes doivent étudier au moins les lois sur les mélanges lait/viande et autres (Yoré Déa 111,112 et 113). Le midrach dit: les 600.000 hommes juifs de 20 à 60 ans ont reçu deux couronnes, au moment du don de la Torah. L’une parce qu’ils ont dit « Naassé: nous ferons » et l’autre parce qu’ils ont dit « Nichema: nous entendrons ». Le Beth Halévi, dans la Parachat Michpatim conclut que la deuxième couronne leur a été donnée uniquement pour l’acceptation de l’obligation de l’étude de la Torah en tant que telle sans forcément d’enjeu d’application. La première couronne revenant de droit à tous hommes et femmes, puisqu’ils se sont engagés à accomplir la Torah, or on ne peut accomplir que ce que l’on connaît.
Ainsi Rabbi Eliezer donne une loi de la Torah à la femme sage: Une femme ne doit pas jouer sur le territoire des hommes, celui des calculs dans les textes, celui de la complexification de la loi.
Mais alors où est la place d’une femme ? Elle doit s’occuper à tisser les tentures extérieures au cœur du sanctuaire, c’est à dire établir une protection à la table des pains de proposition (qui représente l’argent nécessaire au fonctionnement du monde de la Torah), au candélabre (qui représente la sagesse nécessaire à l’étude), à l’autel des encens (qui représente le peu qu’il y a de Vrai et qui touche à l’Etre/l’être dans l’étude que nous faisons) et enfin l’Arche sainte (qui contient la loi à comprendre, objet de tout ce travail, moyen d’accès à l’homme, au monde et à D…).
Comment cela procède-t-il ? Rabbenou Be’hayé, cité plus haut, ajoute que le rôle de la femme ne se limite pas au tissage mais aussi à « l’attention quelle porte à sa maison et l’honneur quelle donne à son mari ». Il fait référence ici à la guémara Yébamot 62b ou plus explicitement au Rambam:
יט,רמב »ם יד החזקה – הלכות אישות פרק טו
וכן צוו חכמים שיהיה אדם מכבד את אשתו יתר מגופו ואוהבה כגופו ואם יש לו ממון מרבה בטובתה כפי הממון ולא יטיל עליה אימה יתירה ויהיה דיבורו עמה בנחת ולא יהיה עצב ולא רוגז
Ainsi les Sages ont ordonné à l’homme d’honorer sa femme plus que son corps et de l’aimer autant que son corps. S’il a de l’argent, il lui fera des cadeaux en fonction des ses moyens. Il n’imposera pas une crainte excessive. Il parlera posément et calmement. Il ne sera pas trop triste ou coléreux.
Les femmes ne sont pas en reste, Halaha suivante:
וכן צוו חכמים על האשה שתהיה מכבדת את בעלה ביותר מדאי ויהיה לו עליה מורא ותעשה כל מעשיה על פיו ויהיה בעיניה כמו שר או מלך מהלכת בתאות לבו ומרחקת כל שישנא וזה הוא דרך בנות ישראל ובני ישראל הקדושים הטהורים בזיווגן ובדרכים אלו יהיה ישובן נאה ומשובח
Les Sages ont aussi ordonné à la femme qu’elle honore son mari au delà de l’excès, qu’elle exprime une forme de soumission, qu’elle exécute ses demandes sur-le-champ, qu’il soit pour elle comme un prince ou un roi, qu’elle anticipe ses désirs et écarte les désagréments. Ainsi est la manière de vivre des filles d’Israël et des fils d’Israël saints et purs dans leur conjugalité. Par cela, leur vie sera bonheur et digne de louange.
Les sources de ces lois sont rapportées par le Kessef michné. Cependant d’où le Rambam tire-t-il que l’homme doit être « comme un prince ou un roi » ? Il semble que le Rambam tire sa source du Avot dé Rabbi Nathan I 28,3 (qui fait suite au Pirké Avot dans masse’het Avoda Zara; source indiquée par le Rabbin Nissim Sultan d’Aix-en-Provence):
Rabbi Chimon ben Gamliel dit: Qui apporte la paix dans sa maison, l’écriture compte comme s’il apportait la paix en Israël entre les hommes; qui porte l’envie et la dispute dans sa maison l’écriture compte comme si il apportait l’envie et la dispute en Israël, car chacun est roi dans sa maison comme dit: « que tout homme gouverne sa maison » (Esther 1,22).
Le verset est le suivant:
וישלח ספרים אל כל מדינות המלך אל מדינה ומדינה ככתבה ואל עם ועם כלשונו להיות כל איש שרר בביתו ומדבר כלשון עמו
On envoya un édit dans toutes les provinces du royaume dans l’écriture et la langue de la province, de sorte à ce que tout homme soit maître dans sa maison et parle sa propre langue.
Ce verset est dit par A’hachveroch qui vient d’exécuter sa reine Vachti parce qu’elle refusait de se présenter devant le roi. Si le roi promulgue un décret obligeant les hommes à prendre le pouvoir sur leur femme c’est que les femmes avaient le pouvoir et qu’il fallait inverser la tendance en obligeant les femmes à parler la langue de leur mari. Ainsi les maisons dans le royaume d’A’hachveroch sont un lieu de pouvoir entre hommes et femmes. Or, d’une part Esther devait tenir sa langue dans le palais d’A’hachveroch et ne pas révéler ses origines, d’autre part Esther accepta d’obéir à Mordé’hai en tout point. Finalement, c’est Esther qui dicte aux Sages le texte, leur devoir en l’occurrence de fêter Pourim tel que nous le faisons. Mordé’hai et Esther fonctionnent en « tandem » tandis qu’A’hachveroch joue le jeu des oppositions. C’est d’ailleurs une idée fixe chez A’hachveroch, le midrach le relève en disant: il tue sa femme (Vachti) sur les conseils de son ami (Haman) et son ami (Haman) sur les conseils de sa femme (Esther). Dans cette histoire qui est un vaudeville, Esther se joue, elle aussi, des antagonismes par lesquels elle confond Haman et son projet.
Le thème de la langue et de l’écrit est récurrent dans la Méguila. Le parler est un point central dans la faute d’Adam et Eve: Adam ne parle pas à sa femme pour lui indiquer l’interdit de manger le fruit, Eve dit au serpent qu’il ne faut pas le manger et le toucher. Le serpent parle avec Eve et lui promet qu’ils seront comme des dieux connaissant le bien et le mal. D. attendait d’Adam et d’Eve qu’ils se conforment à la loi qu’Il leur avait donnée. Au contraire, ils ont redéfini la loi, sous les conseils du serpent, ils ont donc porté atteinte à la souveraineté du Créateur, dans sa capacité à définir le bien et le mal. Ils mangent le fruit, ils se voient nus. Ainsi définir ce qui est bien et mal conduit à un rapport immédiat aux choses. Le Créateur leur donne un habit qui se dit בגד BéGéD. Ce mot s’écrit au moyen des 3 premières lettres non muettes de l’alphabet. En leur donnant un vêtement le Créateur restaure leur honneur et leur redonne la possibilité de parler. A la suite de cela l’homme, parce qu’il a écouté la voix de sa femme, ce qui aurait du être l’inverse, partira en « camp de rééducation »: il devra travailler avec son בגד BéGéD pour se nourrir tandis que la femme sera soumise à son mari et enfantera dans la douleur.
Or il est connu que l’homme véritable ne se nourrit pas seulement de pain mais aussi de ce qui sort de la bouche du Créateur. La domination qu’exerce l’homme est que sa femme ne lui « demande » pas explicitement mais lui indique pudiquement ce qu’elle veut. La femme dans ce schéma doit retrouver un langage suggéré, un langage implicite. Le langage explicite, celui du pouvoir, est réservé à l’homme. Ce labeur, qui est le devoir de réserve, est une voix douloureuse pour la femme. La voix de la privation d’être homme, comme Rabbi Eliezer l’indiquait à la femme sage.
Le Avot dé Rabbi Nathan relève qu’il y a un passage de la maison vers tout Israël, pour le bien ou le mal. Comment ce passage de l’individu au collectif s’opère-t-il ? Donnons-nous, comme a priori d’après notre schéma, que la femme n’opère pas à l’extérieur de la maison. Mais l’homme, le mari est l’interface extérieure du couple vis à vis de la société. La guémara Baba Batra 3b-4a raconte l’histoire très « glauque » de l’élimination de la descendance des Hasmonéens par Hérode esclave de cette maison. Hérode se demande alors:
אמר מאן דריש מקרב אחיך תשים עליך מלך רבנן קם קטלינהו לכולהו רבנן שבקיה לבבא בן בוטא למשקל עצה מניה
אהדר ליה כלילא דיילי נקרינהו לעיניה יומא חד אתא ויתיב קמיה אמר חזי מר האי עבדא בישא מאי קא עביד אמר ליה מאי אעביד ליה א »ל נלטייה מר אמר ליה [כתיב] גם במדעך מלך אל תקלל אמר ליה האי לאו מלך הוא א »ל וליהוי עשיר בעלמא וכתיב ובחדרי משכבך אל תקלל עשיר ולא יהא אלא נשיא וכתיב ונשיא בעמך לא תאור א »ל בעושה מעשה עמך והאי לאו עושה מעשה עמך א »ל מסתפינא מיניה א »ל ליכא איניש דאזיל דלימא ליה דאנא ואת יתיבנא א »ל כתיב כי עוף השמים יוליך את הקול ובעל כנפים יגיד דבר א »ל אנא הוא אי הואי ידענא דזהרי רבנן כולי האי לא הוה קטילנא להו השתא מאי תקנתיה דההוא גברא א »ל הוא כבה אורו של עולם דכתיב כי נר מצוה ותורה אור ילך ויעסוק באורו של עולם דכתיב ונהרו אליו כל הגוים
Puis il se dit : « Qui insiste sur le principe « Tu choisiras un roi du milieu de tes frères » (Deu. 17, 15) ? Ce sont les rabbins. Alors il tua tous les rabbins. II n’en garda qu’un, Baba ben Bouta, pour lui servir de conseiller. II lui mit sur la tête une couronne de peau de hérisson et le rendit aveugle. Un jour Hérode s’assit devant R. Baba ben Bouta [sans se faire connaître] et il lui déclara :
– Vois ce qu’a fait ce méchant esclave: il a tué tous les rabbis et tous les gens qui avaient quelque autorité !
– Qu’y puis-je ? dit R. Baba.
– Maudis-le.
– II est écrit « Ne maudis pas le roi même dans ta pensée » (Ecc. 10, 20).
– Mais ce n’est pas un vrai roi !
– Même si ce n’est qu’un homme riche : il est écrit « ne maudis pas le riche dans la chambre où tu couches » (suite).
– Mais n’est-il pas écrit aussi « Tu ne maudiras point le prince [qui est] avec ton peuple (Ecc. 22, 27), c’est-à-dire qui agit selon [les lois de] ton peuple ?
– Je crains que quelqu’un n’entende ce que tu dis et n’aille le rapporter à Hérode.
– Nous sommes seuls.
– L’oiseau du ciel pourrait emporter ta voix (Ecc. 10, 20).
– Je suis Hérode. Si j’avais su que votre pondération était si grande, je ne vous aurais pas tués. Et maintenant que puis-je faire pour réparer ?
– Tu as éteint la lumière du monde en tuant les rabbis. Va, occupe-toi de la faire renaître [en construisant] le Temple.
Hérode avait en effet éteint la lumière du monde en tuant les rabbis, car « Le précepte est une lampe, et l’enseignement une lumière » (Pr. 6, 23). R. Baba ben Bouta lui demanda de s’occuper le la faire renaître en construisant le Temple, puisqu’il est écrit: Toutes les nations y rayonneront (Is. 2, 2).
De ce texte, on constate encore une fois que les grands du monde fonctionnent suivant un enjeu de pouvoir tandis que le sage ici vit suivant ses principes halakhiques qui transforment Hérode.
Deux conclusions pour finir:
Revenons sur l’expression dans Sota 21b: ר’ אליעזר אומר כל המלמד את בתו תורה מלמדה תיפלות Rabbi Eliézer dit: quiconque enseigne à sa fille la Torah (orale), lui enseigne des obscénités. Des obscénités, dans le sens où il pervertit l’image de la place qu’elle devra prendre auprès de son mari. Obscénités qui feront de la maison de l’homme un espace de conflits et un terrain de rivalité. Le tissage est l’art de préparer le matériel qui recouvrira et donnera la parole juste.
Dans les bénédictions du matin les hommes remercient en disant: « qui ne m’a pas fait femme » parce que dans le monde occidental et même oriental tel qu’il se talibanise, les femmes font le jeu des hommes en se soumettant à leur regard. Elles sont alors abandonnées à la vie publique, à paraître plus qu’être, ou à se taire. Les femmes disent « qui m’a faite comme sa volonté » mais ne disent pas « qui ne m’a pas faite homme » parce qu’elles ne jouent pas dans l’opposition.
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