Le livre de Béréchit est le livre d’introduction à la Thora. La Thora aurait dû commencer par la première mitsva qui se situe dans le deuxième livre, nous explique le premier Rachi.
Le Maharal (Gour Arié sur Béréchit 1,1) relève d’ailleurs que le mot תורה vient du mot הוראה qui signifie « enseignement pratique » (qui vise à l’acte). Le livre de Béréchit aurait donc dû trouver sa place dans le livre des Chroniques, par exemple. En quoi, le livre de Béréchit constitue-t-il une introduction ?
Il existe une quantité de thèmes transversaux dans le livre de Béréchit: celui de la filiation, de la transmission, de la fraternité, de la relation à la promesse, de la bénédiction, … . D’autres thèmes plus épars comme celui du langage ou du vin.
La paracha de Toldot, comme son nom l’indique, est l’occasion d’aborder le thème de la filiation.
יט׳,בראשית פרק כה
ואלה תולדת יצחק בן אברהם אברהם הוליד את יצחק
Voici la postérité d’Itshak, fils d’Avraham: Avraham engendra Itshak.
Le verset insiste sur le fait qu’Itshak était le fils d’Avraham, on le savait déjà, mais aussi qu’Avraham était le père d’Itshak. Le fils se reconnaît dans le père, on se développe à partir d’une référence à partir de laquelle on se démarque avec le temps. Le père reconnaît le fils comme son parfait successeur. Ainsi fils et père sont décrits comme le double l’un de l’autre. Par ailleurs Avraham ne se reconnaît ni dans Ichmaël (bien qu’Ichmaël reconnaisse Avraham comme son père, il fait Téchouva à la fin de sa vie) ni dans les enfants de Kétoura. Au point que Rachi relève même qu’ils avaient le même visage car on aurait pu imaginer que Sarah fut « désinhibée » dans sa relation à Avraham par Avimelekh (voir le Emek davar sur place). Le midrach Tanh’ouma (sur ‘Hayé Sara n°1) donne une raison propre à la relation Avraham/Itshak: les gens de la génération pourraient imaginer qu’ils priaient de la même manière.
Le verset suivant crée un contraste:
ויהי יצחק בן ארבעים שנה בקחתו את רבקה בת בתואל הארמי מפדן ארם אחות לבן הארמי לו לאשה
Quand Itshak eût 40 ans, il épousa Rivka fille de Béthouël l’araméen de Padan Aram, la sœur de Lavan l’araméen.
La filiation de la femme d’Itshak se donne à partir du père, ce qui est normal mais aussi du frère et de son lieu natal. Ainsi Rivka trouve son origine dans sa famille mais aussi dans une certaine société, mais elle fuit ses origines. Elle se sort de son milieu pour vivre avec Itshak qui lui suit l’image de son père.
Quelques années plus tard, Itshak et Rivka ont des jumeaux. Après les frères Caïn et Hével, les demi-frères Itshak et Ichmaël voilà la figure des jumeaux: Essav et Yaacov. Dans leur jeunesse, il n’y a pas de différence entre les deux, si ce n’est qu’Essav est un chasseur tandis que Yaacov est un érudit:
‘כז,’בראשית פרק כה
ויגדלו הנערים ויהי עשו איש ידע ציד איש שדה ויעקב איש תם ישב אהלים
Les enfants grandirent, Essav devint un chasseur habile, un homme des champs et Yaacov un homme simple[1] demeurant dans les tentes. Itshak craint de rater l’éducation d’Essav, donc il s’attache particulièrement à lui et l’encourage dans ses activités. Essav le lui rend bien, il développe le כבוד אב, l’honneur dû au père. Ce sera un trait caractéristique chez lui et ses descendants. Plus tard, Itshak sollicitera Essav, le chasseur car son attitude vis à vis de lui, lui fait penser qu’il sera digne de bénédictions (27,4). Pour Yaacov les choses vont d’elle même, Itshak semble s’en désintéresser. Réussir avec « un réussi » ne donne pas de mérite, l’enjeu est pour Itshak de réussir avec « un raté ».
‘חכ,’בראשית פרק כה
ויאהב יצחק את עשו כי ציד בפיו ורבקה אהבת את יעקב
Itshak aimait Essav parce « qu’il mettait du gibier dans sa bouche » et Rivka préférait Yaacov.
Itshak porte un intérêt certain à Essav, comme son père portait un intérêt à Ichmaël. Avraham et Itshak s’attachent à ramener ceux qu’ils peuvent ramener dans le bien[2]. Pour Rivka, on peut simplifier les choses. Rivka est une Baal Téchouva, elle a quitté son milieu d’origine pour se marier avec un Tsadik et avoir un enfant Tsadik. C’est Yaacov qui incarne son idéal[3]. Or, plus tard, c’est elle qui pousse Yaacov à se déguiser pour voler la bénédiction à son père. De quel droit Rivka peut-elle inciter Yaacov à voler les bénédictions ? Pourquoi Yaacov suit-il sa mère dans ce vol ?
Rivka a déjà reçu une prophétie (Béréchit 25,23) ורב יעבד צעיר: « Le plus grand servira le plus jeune » donc le plus jeune deviendra le chef de son frère, contrairement à la voie normale qui voudrait que ce soit l’aîné qui reprennne le flambeau. Nous connaissons d’autres situations où les voies de l’histoire ne suivent pas la voie légale. Par exemple, Chimon se mariera avec sa sœur Dina, Amram, le père de Moché, se mariera avec Yocheved sa tante, qui sont des mariages interdits. C’est la prophétie qui les a guidés sur cette voie (voir le Gour Arié sur Béréchit 46,10). De plus, Rivka menace Yaacov d’une malédiction certaine au cas où il ne se plierait pas à ses ordres: (Béréchit 27,13): …ותאמר לו אמו עלי קללתך בני אך שמע בקלי: Sa mère lui dit [à Yaacov], sur moi ira ta malédiction mon fils…, mais ce verset peut se comprendre: « c’est moi qui te maudirai mon fils, alors écoute ma voix… ». Pour sa part, Yaacov a déjà acheté le droit d’aînesse à son frère. Or, pour lui le droit d’aînesse בכורה va avec la bénédiction ברכה. A quoi servirait une bénédiction en quantité, en qualité, en sécurité (Sforno, birkat cohanim) et en reconnaissance si ce n’est pour réaliser sa tâche, et non pour en jouir seulement ! Plus simplement, le bon sens et la simplicité vont alerter Rivka sur la nature d’Essav et sur l’aveuglement volontaire d’Itshak[4]:
‘לד-‘לה בראשית פרק כו
ותהיין מרת רוח ליצחק ולרבקה :ויהי עשו בן ארבעים שנה ויקח אשה את יהודית בת בארי החתי ואת בשמת בת אילן החתי
Quand Essav eût 40 ans, il épousa Judith fille de Béeri le ‘Héteen, et Basmate fille d’Elon le ‘Héteen. Elles furent une source d’amertume spirituelle (elles étaient idolâtres: Rachi) pour Itshak et Rivka.
Rivka est alors conduite à mettre en place un stratagème pour amener son mari à ouvrir les yeux. La chute n’en sera que plus dure pour lui, quand il voudra donner la bénédiction à son fils chéri, Essav.
Le moment de la bénédiction venu, elle envoie Yaacov remplacer Essav. Elle prépare ce qu’Itshak avait demandé à Essav. Yaacov déguisé grossièrement en Essav se présente devant son père avec le plat. Itshak a des soupçons sur la personne devant lui. Il pose des questions à Yaacov, le tâte, hésite à le bénir, mange, le fait s’approcher de lui, le sent, l’embrasse et enfin le bénit. Pourquoi Itshak ferme-t-il les yeux sur la personne qui ne lui semble pas être Essav ? Pourquoi reste-t-il dans le doute ou plus exactement pourquoi ne doute-t-il plus que la personne en face de lui est celle qui doit recevoir la bénédiction[5] ? Quand Rivka prépare le plat pour Itshak, elle donne à Yaacov du pain avec le plat (Béréchit 27,17): ותתן את המטעמים ואת הלחם אשר עשתה ביד יעקב בנה: Elle donne, à son fils Yaacov, le plat et le pain qu’elle avait fait. Quand Itshak mange:
כה׳,’בראשית פרק כז
ויאמר הגשה לי ואכלה מציד בני למען תברכך נפשי ויגש לו ויאכל ויבא לו יין וישת
Il dit [Itshak]: Apporte moi que je mange de la chasse de mon fils, afin que mon âme te bénisse. Il [Yaacov] lui apporta, il mangea, lui présenta le vin et il but.
Du vin apparaît. On ne mange pas sans boire, pourquoi alors le texte ne précise-t-il pas que Rivka avait donné à Yaacov le plat avec du pain et pas le vin ?
Le Targoum Yonathan explique qu’un ange apporta à Yaacov du vin conservé dans des raisins depuis la création du monde, or ce vin conduit à bénir. Le Daat Tosfot Zékénim renchérit en précisant que l’ange était Michaël. La loi orale accorde une place importante au vin. Le vin est un thème transversal dans la bible. Tout d’abord le fruit de l’arbre qu’ont mangé Adam et Eve était le raisin d’après Rabbi Méïr (Sanhédrin 70a). Puis Noé planta une vigne, but et se trouva ivre[6] et nu dans sa tente, son troisième fils se « moqua » de lui à la suite de quoi Canaan, son petit-fils, fut maudit comme esclave de ses frères. Que cherchait Noé en plantant après sa sortie de l’arche une vigne ? N’a-t-il rien de mieux à faire ! Pourquoi se soûler au moment d’une nouvelle fondation de l’humanité ? Après le déluge, Noé, le rescapé, sombre dans la nostalgie d’un passé révolu. En sortant de l’arche, il plante une vigne pour se soûler et replonger dans l’alcool, dans son époque. Il a été incapable de sauver son monde lui le grand juste de son temps[7]. Un peu plus tard, c’est Loth qui succombe sous l’effet du vin et couche avec ses deux filles. Apparaissent alors les pères fondateurs des nations d’Amon et Moav. Ces trois exemples indiquent un lien entre le vin, la fondation de l’humanité ou de peuples et la dégradation des fondateurs. Un cas semble échapper à cela, c’est Malki Tsedek Roi de Chalem, la tradition l’identifie à Chem (Béréchit 14,18 et Rachi). ומלכי צדק מלך שלם הוציא לחם ויין והוא כהן לאל עליון: « Et Malki Tsedek roi de Chalem sortit du pain et du vin, il était le prêtre du D. Suprème ». La guemara (Nédarim 32b) relève que lui aussi ne semble pas sortir indemne de sa confrontation avec le vin: Il perd la Grande Prêtrise au profit d’Avraham parce qu’il a béni Avraham avant de bénir le D. Suprême (Béréchit 14, 19: ברוך אברם לאל עליון: béni soit Avraham du D. Suprème)[8]. Le premier face à face avec le vin plus ou moins réussi semble être celui d’Itshak[9], encore fallut-il un miracle (apporter du vin conservé dans des raisins depuis la création du monde par un ange).
Quel est l’enjeu au travers du vin ? Le vin désinhibe le buveur, le vin délie les langues, il crée une atmosphère conviviale (l’abus d’alcool est dangereux). Par exemple, le vin des libations exprime l’idée d’une la proximité particulière avec D.[10].
Le vin symbolise aussi la Thora et la sagesse comme dans Proverbes 9,5: לכו לחמו בלחמי ושתו ביין כתימס: « Venez profiter de mon pain et boire du vin coupé »[11]. De plus, le principe est connu: (Erouvin 65a): רבי חייא כל המתיישב ביינו יש בו דעת שבעים זקנים יין ניתן בשבעים אותיות וסוד ניתן בשבעים אותיות נכנס יין יצא סוד: « Rabbi ‘Hiya dit: quiconque tient le vin a l’intelligence[12] des 70 sages (qui siègent au grand tribunal du temple de Jérusalem) car le mot « vin » a une valeur numérique de 70 et le mot secret a une valeur numérique de 70. Ainsi lorsque le vin entre, le secret sort « . Le vin fait donc référence aux secrets de la Thora. Les 70 sages faisant référence au 70 aspects de la Thora. Le Maharal à la fin du Gvourot Hachem écrit un petit opuscule sur l’interdit du vin des non-juifs. Il explique que le vin est absorbé dans le raisin mais séparé de la pulpe, il en est ainsi du secret, présent à peu de distance mais insaisissable parce que hétérogène avec la chair (dans Sanhédrin 38a, Rabbi Yéhouda Ha Nassi fait les frais d’une confrontation avec un sage ayant bu juste de quoi le désinhiber)[13].
Reste à éclaircir ce que dit le Targoum Yonathan: un ange apporta à Yaacov du vin conservé dans des raisins depuis la création du monde. Dans Sanhédrin 99a:
מאי עין לא ראתה אמר רבי יהושע בן לוי זה יין המשומר בענביו מששת ימי בראשית רבי שמואל בר נחמני אמר זה עדן שלא שלטה בו עין כל בריה שמא תאמר
אדם הראשון היכן היה בגן ושמא תאמר הוא גן הוא עדן תלמוד לומר ונהר יצא מעדן להשקות את הגן גן לחוד ועדן לחוד
Que signifie « aucun œil ne l’a vu » (Isaï 64,3) [Il s’agit de la récompense du Baal Téchouva ou du véritable juste, suivant les opinions cités préalablement dans le texte] ? Rabbi Yochoua ben Lévi a dit: c’est le vin conservé dans ses grains de raisins depuis les six jours de la création. Rav Chemouel Bar Na’hmani a dit: c’est l’Eden que personne ne peut voir. Peut-être demanderas-tu: où était Adam alors ? Il était dans le Gan. Peut-être diras-tu le Gan c’est L’Eden ? Le texte dit: « 4 fleuves sortait de l’Eden et arrosait le Gan » donc le Gan est une chose et l’Eden une autre (banlieue de l’Eden).
Le Yad Rama explique que si du vin est enfermé dans des raisins alors personne ne peut le boire, ainsi personne ne peut percevoir vraiment l’essence de la récompense. Le Margaliot HaYam explique que ce vin est la connaissance secrète de la Thora qui sera révélée aux Baal Téchouva ou aux véritables justes à la fin des temps. Le Maarcha expose que dans le monde futur il n’y a ni à manger ni à boire mais que les justes profitent du « rayonnement du Créateur ». Le Maharal explique à nouveau que le jus de raisin est absorbé dans le raisin tout en en étant séparé, il en est de même pour Israël qui est séparé du monde concret tout en y étant impliqué. Ainsi, relève le Maharal, ce jus existe depuis la création du monde parce qu’il a son autonomie propre mais ne peut exister sans une enveloppe. Il y a cependant une relation entre ce vin qui est lié à la pulpe du raisin et l’Eden qui lui n’a aucun besoin de sa banlieue (le Gan). Ainsi l’homme peut avoir besoin du monde pour exister. Par exemple pour prier on a besoin d’avoir un corps pour demander la santé, des besoins pour demander à boire, à manger, de l’argent. Parfois n’en a pas besoin: comme Avraham qui servait D. alors qu’il avait tout. Comme Yaacov qui doit avoir tout pour reconnaître la grandeur de son Créateur et parler avec lui sans avoir besoin d’une raison vitale ou de confort pour le faire (4ème porte du Nefech Ha’Hayim).
Yaacov n’a peut être pas apporté du vin réel à son père mais il lui a certainement dit des choses qui relèvent du secret symbolisé par le vin, c’est à dire des mots sur l’essence du monde ou de l’expérience d’Adam[14] dans le Gan, enfin des choses qui relèvent de l’universel. C’est cela qu’a reconnu Itshak chez celui qui est venu prendre la bénédiction et méritait de la recevoir. Il a reconnu là le vrai successeur de la tradition d’Avraham.
Par contre, lorsque Essav entre, (Béréchit 27,33): ויחרד יצחק חרדה גדלה עד מאד: Itshak trembla, d’une terreur extrêmement grande. Pourquoi une telle panique ? Parce qu’il y a peu de différence entre une vision partielle des choses et une perception qui touche réellement à l’essence du monde. Itshak percevait Essav par son כבוד אב, l’honneur qu’il rendait à son père et il pensait que cette action le conduirait à l’essence c’est à dire à la reconnaissance du Père céleste (beaucoup ont brandi ou brandissent encore leurs erreurs comme étendard à suivre pour l’humanité). Par contraste, Itshak se rend compte que le travail laborieux et discret de Yaacov le conduit à toucher à de « l’essentiel »[15].
[1] Rabbi Chimchon Raphaël Hirch traduit le mot תם par: qui s’assigne un but et le poursuit
[2] Au contraire de Loth qui a une position tranchée vis à vis d’Avraham puisqu’il va vivre à Sodome.
[3] R. Munk calcule que Yaacov est resté 32 ans, étudiant à la Yechiva de Chem et Ever pour sa formation initiale.
[4] Il semble difficile de croire qu’Itshak soit aveugle pour ne pas dire stupide à ce point. Itshak pensait sûrement que par la dévotion de son fils à son égard et l’attention qu’il portait à la mitsva de כבוד אב, il accéderait à la recherche et à l’acceptation de toutes les mitsvot. Tout comme Itshak était attaché à son père puis a fait son propre chemin. Il réouvre les puits que son père avait creusés. Il va de soi que les puits ne sont qu’une allusions aux chantiers de recherche ouverts par son père. Le mot באר (puit) signifie ביאור (éclaircissement, explication). Ainsi Itshak, en allusion dans le texte, fait les mêmes recherches et donc les mêmes trouvailles que son père ce sont les 5 livres de la Thora (Béréchit Rabba 64,8).
[5] Il a senti chez Yaacov le parfum du Gan Eden qu’il connaissait de la grotte où il priait pour recevoir une épouse digne et dans laquelle était enterré Adam et Eve.
[6] Sanhédrin 70a: Noé est appelé « homme de la terre » (Ber. 9,20) parce qu’il aurait du apprendre d’Adam qui a chuté à cause de la vigne. Dans Béréchit Rabba 36,3, l’ange de la destruction met en garde Noé quant à la consommation du vin.
[7] Dans Zéva’him, Noé a apporté une racine de vigne dans l’arche car il avait l’intention de faire des libations avec les sacrifices qu’il fit après le déluge. Ceci lui a été refusé. Donc il noie son chagrin (c’est à dire la distance que D. prend avec lui, dans l’alcool. De plus, la forme de l’arche et la forme de référence pour la fabrication des pains de proposition. Ainsi Noé pendant de déluge s’enferme dans le monde des mots (L’arche: Téva signifie mot), il y retrouve leur véritable sens et par là même reconstruit une certaine spiritualité. Le midrach nous apprend d’ailleurs que Malki Tsedek, qui n’est autre que Chem, l’héritier spirituel de Noé, transmis à Avraham les lois concernant les libations et les pains de proposition dans le temple (Ber. Rabba 43,6).
[8] On se demande comment Chem peut être si grossier. Un commentateur explique que lui, comme Noé, n’avait pas « la capacité » de faire reconnaître le D. suprême à ses contemporains. Alors il s’est contenté de signifier à son entourage qu’Avraham est celui qui peut le faire.
[9] On Ben Pelette, meneur dans la dispute de Kora’h avec Moché, au sujet de la grande Prêtrise d’Aaron s’en sort aussi un peu grâce au vin et surtout à sa femme. Aaron est accusé par Kora’h et de son assemblé d’avoir trahi sa fonction sacerdotale en aidant à fabriquer le veau d’or. On Ben Pelette, au contraire de Kora’h et de son assemblé, survit grâce au vin que lui donne sa femme. De plus, elle se découvre les cheveux. Ici, le vin est un instrument pour sa femme, il ne sert qu’à tenir à distance l’assemblé de Kora’h qui ne peut tolérer un ivrogne marié à une mécréante dans ses rangs.
[10] Proximité refusée à Noé: D. ferme la porte de la Téva derrière lui au moment du déluge. Il lui demande d’en sortir après. A la différence d’Avraham qui « marchait devant D. ». Noé est l’apôtre d’une religion où D. est au service de l’homme. Chem le reprend sur ce point (Nédarim 32b). Noé « fait du social » en son temps, il libère les gens de la malédiction d’Adam « tu mangeras ton pain à la sueur de ton front » et affranchi ses contemporains de l’interdit de l’usage de la charrue (Béréchit 5,29 et Rachi au nom du Tan’houma). Avraham a pour credo « garder la voie de D., en pratiquant la charité et la justice » ושמרו דרך ידוד לעשות צדקה ומשפט (Béréchit 18,19). En quoi peut-on dire qu’un juif d’aujourd’hui est un fils d’Avraham par rapport aux non-juifs appelés fils de Noé ? La réponse semble simple: Noé place les hommes avant D. tandis qu’Avraham est d’abord un fou de D. qui fait du bien aux hommes pour les amener à D.. Pour Avraham les hommes ne lui servent même pas à approfondir sa relation à D.. On pourrait presque dire que pour Noé D. est dans le décor du monde tandis que le monde est un décor dans la relation d’Avraham avec D..
[11] Métsoudat David, Rabbénou Bé’hayé introd. paracha Vayélek: le pain et le vin sont les nourritures du corps mais la Thora et la sagesse sont les nourritures de l’âme
[12] On pourrait dire « fait corps avec le savoir »; on parle ici de quelqu’un qui malgré le vin ne perd par le sens des réalités parce que sa réalité n’est pas ancrée dans sa forme (qui disparaît au contact du vin), mais dans ce qui lui reste une fois dépouillé de sa forme, c’est à dire de ce que la société lui impose de bienséance.
[13] il faut lire ce texte surprenant. Je l’utiliserai pour conclure.
[14] le midrach rapporte qu’il avait le même visage qu’Adam
[15] Itshak se rend compte de son erreur, à savoir un investissement perdu dans l’héritier qui n’est pas intéressé par l’héritage, mais c’est là un moindre mal.
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