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Parashat Terouma. Yaacov, le Développement par les limites. Seconde partie.

par: Rav Raphaël Bloch

Publié le 1e Mars 2017

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Chemot chapitre 26 verset 15 : « et tu feras les poutres pour le Michkan (tabernacle) en bois de Chittim, debout. »

Rachi :  «il aurait dû dire « des » poutres comme pour les autres objets équipant le Michkan;  « les » poutres (את הקרשים) ce sont celles qui se tenaient spécialement réservées pour cela ».

Notre ancêtre Yaacov avait planté des cèdres en Égypte et avant de mourir ordonna à ses enfants de les emporter avec eux lors de la sortie d’Égypte. Il leur dit : le Saint Bénit Soit-Il vous demandera de faire un Michkan dans le désert, de bois de Chittim, faites en sorte que ce soit déjà préparé dans vos mains.

Rachi se montre ici fidèle à la mission qu’il s’est défini, commentateur selon le sens littéral. Il est évident qu’on ne trouve pas dans le désert de bois et il fallait donc que ceci ait été prévu. Néanmoins rien n’obligeait à faire remonter ce projet à Yaacov, il y a donc certainement une explication qui permet l’implication de celui-ci à cette étape de la construction du Michkan.

Une autre source rapportée dans le Midrash Rabba.

À propos du départ de Yaacov d’Eretz Israël pour rejoindre son fils Yossef en Égypte, il est dit, Genèse, chapitre 24 verset 4 : « Israël partit avec tout ce qui était à lui, il vint à Beer Sheva. »

Le Midrash demande : mais où allait-il ? (Ce n’est pourtant pas le chemin pour se rendre en Égypte !). Rav Nahman répond : il est allé couper les cèdres plantés par son grand-père Abraham à Beer Sheva.

Ce midrash fait référence aux versets 33 du chapitre 21 de la Genèse qui dit à propos d’Abraham :  « il planta un verger à Beer Sheva, il proclama là-bas le nom d’Hachem, D… du monde » (voir Targoum et Rachi).

Là aussi nous trouverons Yaacov à l’origine des bois qui vont servir au Michkan avec cette nuance que l’œuvre première, la plantation, doit être imputée à Abraham.

Revenons à notre Paracha ; dans le même chapitre après avoir détaillé le nombre de poutres et leur répartition puis les barres destinées à les renforcer, la Torah nous dit au verset 28 : « et la barre centrale (passera) à l’intérieur des poutres traversant d’un extrême à l’autre. »

Pour Rachi cette barre est particulière en cela qu’à l’inverse des autres barres qui font chacune la moitié d’un côté, celle-ci allait d’un bout à l’autre (voir Rachi).

Mais la Guémara Shabbat 98A nous livre un tout autre enseignement : la barre centrale par miracle faisait le tour des trois côtés.

Le Targoum Yonatan lui aussi explique ainsi ce verset mais ajoute que cette barre aurait été taillée par les anges qui la portèrent au passage de la Mer et proclamèrent : « voici la barre qui fut plantée par Abraham à Beer Sheva ».

Le midrash (Daat zekenim Mibaale Hatossfot) nous enseigne que l’origine de cette barre serait le bâton de Yaacov :  Genèse chapitre 32 verset 11, « car avec mon bâton j’ai traversé le Jourdain ».

L’idée générale qui ressort de tous ces textes semble être la suivante : c’est le travail commencé par Abraham et achevé par Yaacov qui permet de former l’enceinte du Michkan et ceci d’une manière miraculeuse. Or, précisément, le concept même de donner une place, un lieu, une résidence à D… que nos Maîtres désignent par le Lieu (מקום) (parce qu’Il est le lieu du monde et non le monde son lieu) est par essence miraculeux. Comment peut-on fixer des limites à ce qui est par nature illimité ?

Mais cette problématique est déjà présente dès la création du monde. Celui-ci est un objet limité dans l’espace et le temps et pourtant a été créé par D… l’Illimité. C’est le destin de l’être humain, but ultime de la création, de retrouver le lien qui l’unit à D… Et c’est précisément par le travail accompli par les patriarches Abraham, Itshak et Yaacov que cette relation avec D… s’installe dans la condition humaine.

Mais ce ne sera achevé qu’avec la venue du Mochiah Ben David. Ainsi Rabenou Behaye décrit les différents côtés du Michkan comme représentant les trois patriarches et David. Tant que ce dernier ne sera pas venu, la mission qui incombe au genre humain et en particulier au peuple d’Israël est d’accomplir la volonté divine en s’inscrivant dans la réalité limitée du monde et en pratiquant les commandements de la Torah. C’est ainsi, paradoxe apparent, qu’il rétablit le lien avec l’Illimité.

(voir du même auteur sur la même problématique : Yaacov, le développement par les limites, au lien
http://www.yechiva.com/index.php?option=com_content&view=article&id=297:119&catid=66:vaychlah&Itemid=133 )

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