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La Séouda Chlichit

par: Yonathan M

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Dans la guemara (traité Chabbath, 117b) les ‘Hakhamim (les sages) et Rabbi ‘Hidka discutent du nombre de repas à faire pendant chabbath.

Dans la guemara (traité Chabbath, 117b) les ‘Hakhamim (les sages) et Rabbi ‘Hidka discutent du nombre de repas à faire pendant chabbath. Les ‘Hakhamim pensent que l’homme a l’obligation de faire trois repas et Rabbi ‘Hidka pense qu’il doit en faire quatre. Ces deux opinions ont pour source un même verset : (Exode 16,25, à propos de la manne ) « Moché dit : Mangez-la aujourd’hui car c’est chabbath aujourd’hui pour D., aujourd’hui vous n’en trouverez pas dans le champs ». Les ‘Hakhamim et Rabbi ‘Hidka s’accordent sur le fait que la répétition du mot « aujourd’hui » fait référence aux repas de chabbath dont le verset nous fait le décompte. Néanmoins, les ‘Hakhamim pensent que le verset inclut le repas du vendredi soir tandis que Rabbi ‘Hidka pense qu’il ne l’inclut pas. En effet Moché s’adresse au peuple le chabbath matin, le verset prête donc aux deux interprétations. Quoiqu’il en soit la guemara conclue selon les ‘Hakhamim, apportant une preuve de la michna suivante :

(Chabbath 117b) « On sauve la nourriture pour trois repas. Ce qui convient pour un homme, (on le sauve) pour un homme ; et ce qui convient pour une bête, pour une bête ». (Explication : Si un incendie se déclare chabbath dans une maison qui donne sur une cour commune où les différents propriétaires ont fait un érouve , bien que théoriquement on pourrait sortir de la maison vers la cour tout objet permis de déplacer chabbath, les ‘Hakhamim n’ont autorisé de sauver que la nourriture nécessaire aux animaux et à trois repas pour les êtres humains. C’est une « barrière » des ‘Hakhamim afin que l’homme, obnubilé par son argent, n’en vienne pas à éteindre l’incendie, et transgresse ainsi un des trente neuf travaux interdits le chabbath).

La Michna continue : « Comment ? (Comment s’applique ce principe ?) Si l’incendie est tombé : 1) la nuit de chabbath, on sauve la nourriture de trois repas. 2) Le matin, on sauve la nourriture de deux repas. 3) A min’ha (l’après-midi), la nourriture d’un repas ». (Dans ces trois cas, explique Rachi, le feu a pris avant le repas.)

« Rabbi Yossi dit : « on sauve toujours la nourriture de trois repas. » » Peu importe le moment où le feu a pris.

Ainsi la discussion entre le premier avis de la michna et Rabbi Yossi ne porte pas sur le fait de savoir s’il faut faire trois repas mais uniquement sur le fait de savoir si on sauve l’équivalent des repas déjà passés. Ils sont donc d’accord sur le fait qu’il faut faire trois repas.

Il est maintenant établi que nous avons l’obligation de faire trois repas durant chabbath. Nous allons nous pencher sur les différents aspects halakhique (législatif) de cette obligation. Et puisque tout le monde a l’habitude de manger vendredi soir et à midi, nous allons particulièrement nous intéresser au troisième repas « séoudah chlichith » qui étant le dernier des trois repas de chabbath complète l’accomplissement de cette mitsvah.

Voici les trois points que nous allons explorer : 1) Qui a l’obligation de faire séoudah chlichith ? 2) Que devons-nous manger pour être quitte de notre obligation ? 3) Quand précisément devons-nous faire séoudah chlichith ?

1) Qui a l’obligation de faire séoudah chlichith ?

 

La réponse est simple : tout le monde. Il est malgré tout intéressant de remarquer que le Choul’han aroukh fait cette précision, de façon lapidaire, à la fin de son chapitre consacré à séoudah chlichith : « les femmes ont l’obligation de séoudah chlichith. » Ce point est rapporté par Rabbénou Nissim (Talmud, traité Chabbath page 44a dans le Rif) au nom de Rabbénou Tam, et en voici l’explication (Choul’han aroukh, Orakh ‘Haïm 271.2.). On sait que les femmes doivent, comme les hommes, respecter tous les commandements négatifs. Pour ce qui est des commandements positifs elles n’ont obligation que sur ceux qui ne dépendent pas du temps.

Cependant chabbath fait exception car les femmes y ont exactement les mêmes obligations que les hommes. Nous apprenons cela des termes «זָכוֹר » et «שָמוֹר » des versets : (Chemoth 20,8) « לקדשו השבת יום את זכור » « mentionne le jour du chabbath pour le sanctifier » et (Devarim 5,12) « אלהיך יהוה צוך כאשר לקדשו השבת יום את שמור » « Garde le jour du chabbath pour le sanctifier comme te l’a ordonné hachem ton D… . ». Ces deux versets sont cités à deux endroits différents dans la Torah mais sont en réalité dit au même moment par D… à Moché Rabbénou, plus précisément les termes זָכוֹר et שָמוֹר sont prononcés en même temps par D… .

Le terme « זָכוֹר », dit Rabbénou Nissim, inclut toutes les obligations de chabbath (kidouch, séoudah chlichith etc.), qui sont, elles, des obligations positives dépendantes du temps auxquelles les femmes ne devraient a priori pas s’astreindre ; mais le terme « שָמוֹר » qui représente tous les interdits de chabbath, qui eux concernent également les femmes, lui est associé pour nous apprendre que chabbath de même que les femmes ont les interdits de « שָמוֹר », elles ont également les obligations de « זָכוֹר ».

Les femmes ont donc comme les hommes la mitsvah de séoudah chlichith dans tous ses détails.

2) Que devons-nous manger pour être quitte de notre obligation ?

 

Les trois « aujourd’hui » du verset dont nous apprenons les trois repas de chabbath font référence à la manne qui remplaçait le pain. Les sages en déduisent donc que les trois repas doivent être basé sur du pain. De plus Rabbi Ava dit (guemara chabbath 117b) que chabbath il faut faire motsi sur deux pains (משנה לחם) car le verset dit (chemoth 16,22 toujours au sujet de la manne) : « Et ce fut le sixième jour (de la semaine) ils recueillirent pain double, deux omer pour chacun… ». Néanmoins les avis son partagé quant à savoir si cette obligation de משנה לחם concerne aussi séoudah chlichith. Rambam dit qu’il faut faire motsi sur deux pains comme pour les autres repas de chabbath. Le Tour rapporte que son père le Roche faisait comme Rambam. Cependant, le Beith Yossef, au nom du Chibolé halékèt citant lui-même Rabbi Biniamin, dit qu’il ni y a pas lieu d’être extrêmement pointilleux là-dessus. En effet Le vendredi les benei Israël recevaient la manne de chabbath en plus de celle de vendredi. Deux omer pour l’ensemble des deux jours dont ils faisaient quatre pains, ils se retrouvaient donc vendredi matin avec quatre pains, vendredi soir avec trois pains, chabbath au matin avec deux pains, mais il ne leur en restait qu’un au moment de séoudah chlichith. Le Beith Yossef conclut toutefois que celui qui fait attention à prendre deux pains à séoudah chlichith est méritant. Quoiqu’ il en soit il faut faire séoudah chlichith avec du pain comme le dit Rabbi Yossef Caro dans le Choul’han aroukh (291. 5.) avant de citer un avis selon lequel on peut faire séoudah chlichith avec du mézonoth, puis un avis selon lequel il suffit de manger de la viande ou du poisson et enfin un avis selon lequel il suffit de manger des fruits. Le Michna beroura explique que la discussion ne porte que sur le fait de savoir ce qu’il faut avoir mangé pour être quitte à posteriori, mais que tous les décisionnaires sont d’accord qu’à priori il faut prendre du pain. Après cette énumération le Choul’han aroukh conclut qu’il faut faire comme le premier avis qui dit de manger du pain sauf si on est plus que rassasié, auquel cas on peut se rabattre sur du mézonoth, si c’est encore trop, sur du poisson ou de la viande etc.

Il faut donc faire séoudah chlichith avec du pain, et ne se servir de mézonoth que de façon exceptionnelle. Rabbi Yossef Caro dit d’ailleurs dans le premier paragraphe des lois de séoudah chlichith (ora’h ‘haïm 291) que celui qui fait les choses intelligemment ne se remplit pas trop le ventre lors du repas précédant pour laisser de la place pour séoudah chlichith. Il y rappelle également que si on n’a vraiment plus faim, il suffit de manger en pain l’équivalent d’un peu plus du volume d’un œuf pour être quitte de son obligation de séoudah chlichith.

3) Quand précisément devons-nous faire séoudah chlichith ?

 

Tossfoth relève que la michna dit : « si l’incendie est tombé à min’ha (l’après-midi), on sauve la nourriture d’un repas ». Il en déduis que la période de séoudah chlichith débute à l’heure à partir de laquelle on peut faire min’ha (voir également le Maguid michné sur le Rambam (chabbath 30,9) qui dit que le Rambam est du même avis que Tossfoth), c’est à dire six heures et trente minutes après le levé du soleil. Tossfoth ajoute qu’il ne faut donc pas faire comme ceux qui pratiquent une interruption dans le repas du matin en faisant birkath hamazone (action de grâce après le repas) puis refont tout de suite motsi sur du pain, car le moment de faire séoudah chlichith n’est pas encore arrivé. C’est également l’avis du Roche -chabbath chapitre 16, lettre 5- voire aussi le Mordekhichabbath paragraphe 397

De plus, d’après Tossfoth, il y aurait ici l’interdit de « berakha chééna tsrikha », c’est-à-dire de faire des bénédictions (et donc de prononcer le nom de D…) sans nécessité.

Toutefois, Rabbénou Nissim rapporte le Baal Halakhoth Guedoloth qui n’est pas d’accord avec Tossfoth. Il pense lui que les repas ne doivent pas spécialement avoir lieu le matin (en tout cas avant ‘hatsoth (le milieu du jour en heures zmanioth)) et l’après-midi, et que s’il interromps son repas du « matin » en faisant birkath hamazone puis qu’il refait motsi et mange en pain l’équivalent du volume d’un œuf, il est quitte de son obligation de séoudah chlichith.

 

La halakha est qu’on ne pourra pratiquer cette interruption et ainsi être quitte de son obligation de séoudah chlichith, que dans le cas où d’une part son premier repas de la journée se prolonge au moins jusqu’à l’heure à partir de laquelle on peut faire séoudah chlichith, et que d’autre part on sait qu’on ne pourra plus rien ingurgiter si on ne mange pas tout de suite. Le Tour dit que son père le Roch faisait comme ça. (Ainsi que le disent les sages, tant qu’il mange l’estomac est ouvert, ce qui n’est plus le cas après le repas). La halakha est donc comme Tossfoth pour ce qui est de la période où on peut faire séoudah chlichith mais pas pour ce qui est du problème de « berakha chééna tsrikha ». En effet puisqu’on dit ces bénédictions (birkath hamazone, nétilath yadaïm et motsi) pour accomplir séoudah chlichith dans les règles, on ne les prononce pas en vain. (Il est à remarquer qu’on ne peut pas avancer cet argument, qui nous débarrasse du problème de dire des bénédictions en vain, dans tous les cas. notamment pour ce qui est de l’obligation de dire cent bénédictions par jour, où il faut faire attention à ne pas dire de bénédiction inutile, par exemple en mangeant exprès le dessert après avoir fait birkath hamazone pour être obligé de refaire une berakha a’haronah (Maguen Avraham, ohr ha’haïm 215,6) (voire le choul’han aroukh harav qui est ‘holek, orakh ‘haïm 215.5). Néanmoins, Rabbi Moché Isserless dit que celui qui sait qu’il pourra encore manger après la courte interruption nécessaire pour faire min’ha doit d’abord faire min’ha, ceci afin d’écarter tout risque de « berakha chééna tsrikha ».

L’heure jusqu’à laquelle on peut faire séoudah chlichith est également limitée. Il faut avoir commencé à manger avant le coucher du soleil. En effet le moment entre le coucher du soleil et la nuit (la sortie des étoiles) est particulier. Il y a un doute quant à savoir s’il fait partie du jour qui fini ou s’il fait déjà partie du lendemain, en d’autre termes, si c’est encore chabbath ou pas, et donc si on a déjà l’obligation de faire havdalah. Cependant, contrairement au kidouch du vendredi soir, pour lequel, même si on était déjà en train de manger vendredi après-midi, on doit s’arrêter au moment où le soleil se couche ; pour havdalah, il est seulement interdit de commencer à manger après le coucher du soleil mais on a le droit de poursuivre son repas commencé avant.

Toutefois, le Michna beroura dit que, à posteriori, si on n’a pas pu commencer séoudah chlichith avant que le soleil ne se couche, on peut (et doit) encore commencer à manger après le coucher du soleil jusqu’à ½ heure avant la nuit. Rav Sim’ha Rabinovits remarque dans son livre le Piskey tchouvoth, que ce que dit le Michna beroura n’est valable que dans les pays où le temps entre le couché du soleil et la sortie des étoiles est nettement supérieur à ½ heure. Dans d’autres pays et notamment en Israël où ce laps de temps n’est que d’une vingtaine de minutes (jusqu’à treize minutes à certains endroits), il est strictement interdit de commencer à manger après le couché du soleil.

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