La génération de « la tour de Babel » est désignée dans nos textes par dor hahaflaga, littéralement : génération de la séparation.
La génération de « la tour de Babel » est désignée dans nos textes par dor hahaflaga, littéralement : génération de la séparation. On veut désigner la catastrophe. Nos Sages considèrent que la perturbation des langues et la dispersion qui s’en suivit forment une sérieuse punition. C’est un sujet en soi. Mais quelle était donc la faute de cette génération ?
Le paragraphe concernant cet épisode est très court (Berechit 11, 1-9), je vous invite à le lire et à constater comme le Midrash (Berechit Rabba 38, 6) que « l’action de la génération du déluge a été explicitée, celle de la génération de la haflaga ne l’a pas été ». En d’autres termes, on ne voit pas bien quel est le mal qu’a commis cette génération.
Rabbenou Be’hayé (Vayikra 23, 24 ; Devarim 32, 43) enseigne que les éléments qui ne sont pas apparents à l’homme (le monde futur par exemple…), qui exigent de percer le monde naturel, ne sont en général pas explicités dans la Torah. On peut penser ainsi que l’action de cette génération était en apparence très positive, ou du moins peu malsaine ou dangereuse…
Il ressort de notre Paracha que les hommes du dor hahaflaga se sont unis pour construire la tour de Babel. Le Midrash (cité plus haut) explique que la génération du déluge était plongée dans le vol, résultat : il n’y eut pas de survivants. En revanche, les gens de la génération de la haflaga s’aimaient, D. les laissa vivre. L’union qui régnait était donc positive.
Toutefois, d’après nos Sages (Rachi, Rabbenou Be’hayé…), il y avait de graves intentions derrière leur unité. Le Sforno (sur les versets 5-6) explique que le mal n’était pas encore fait, mais que D. a anticipé la punition. La construction d’un édifice en commun allait déboucher sur l’union derrière un roi, derrière une puissance, et finalement derrière une idole. Le monde entier allait être réuni, sans possibilité de s’extraire de cette « pensée unique ». Qui alors reconnaîtrait D. ? A l’inverse, la séparation des hommes, mêmes idolâtres, peut entraîner qu’on reconnaisse finalement un D. supérieur aux autres dieux.
Les commentaires expliquent également que D. voulait que les hommes prennent possession de la terre et se dispersent (chapitre 9, versets 1 et 7), contrairement à ce que voulait cette génération. Cela semble peut-être un peu simpliste, mais on peut le comprendre comme le Sforno. C’est-à-dire que le développement sur terre doit permettre à terme de reconnaître D. Il existe un rapport à la nature qui le permet. Mais une forme de civilisation qui recherche un « renom » (voir chapitre 11, verset 4), qui veut exister par elle-même sans sentir sa dépendance à un cadre terrestre imposé par D., s’extrait de Son projet.
Plusieurs textes soulignent qu’une des forces de cette génération était dans la parole (par exemple Berechit Rabba 38, 1). Effectivement, les versets explicitent leurs projets : « fabriquons des briques… construisons une ville ». Il semble qu’ils n’aient pas saisi la force de leur parole, l’utilisation qu’ils auraient pu en faire pour progresser. Rachi cite le Midrash qui relate qu’à ce moment, Nimrod a réussi à convaincre le monde de se révolter contre D. (chapitre 10, verset 8).
L’humanité avait vécu le déluge juste 340 ans auparavant (à l’époque les gens pouvaient vivre 200 ans sans trop de problèmes). Nous sommes en 1996 (depuis la création d’Adam, naturellement), Noa’h ne meurt que dix ans plus tard, au moins un de ses fils (Chem) est encore vivant. On peut discuter des raisons du déluge : catastrophe naturelle ou courroux de D. ? D. avait parlé à Noa’h avant le déluge en lui en expliquant la raison (contrairement au tsunami de 2005…). On croit décemment son père. On pouvait décemment croire Noa’h ou Chem. D’après un simple calcul, Avraham a à ce moment 48 ans. Si on l’avait laissé parler, il aurait pu peut-être s’exprimer. En effet il a fait selon nos Sages dix ans de prison (voir la Guemara Baba Bathra 91a). La force de l’unité réside aussi par le fait qu’on reconnaît avec elle certaines individualités. A l’époque, la réflexion sur le sens du monde aurait pu donner des débats intéressants… Mais les hommes n’ont pas réussi à s’unir pour la bonne cause, et ont donc été dispersés.
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