LA DIMENSION DE ‘HESSED (LA GENEROSITE) SE TROUVE EN TOUT
par: Caty ZyzekPublié le 24 Mai 2020
Ce texte est la traduction et l’adaptation d’un cours de Rav Yérou’ham Léibovitz, Mashguia’h de Mir, par Madame Caty Zyzek.
Ce texte est publié pour l’élévation de l’âme de Mme Mi’hal bat Avraham.
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Au sujet du verset de Nombres 22, 31 : « וַיְגַל יְהוָה, אֶת-עֵינֵי בִלְעָם », « et D. a ouvert les yeux de Bilham », le Ramban met en relief le mot « וַיְגַל », il a dévoilé, mais n’était-ce pas là une vision prophétique ? (C’est-à-dire une révélation nouvelle et non pas quelque chose d’existant qu’il faut seulement révéler). Et du fait que c’est vraiment une prophétie qui porte sur le futur, tout cela n’est donc pas une créature nouvelle, car dans la création de l’homme il y a tout déjà, mais c’est juste qu’il ne voit pas cela du fait de l’obturation de son cœur et ce qui le recouvre. Et lorsqu’on retire l’obturation du cœur, alors on voit tout. Et nous allons rapporter là une chose qui est l’un des fondements du Service sacré de l’homme, et en vérité l’homme est investi dans ce fondement toute la journée, et malgré tout, il n’en sait rien du fait de l’obturation du cœur et de ce qui le recouvre. En fait, le ‘Hessed est le fondement de toute la Création et du Service de l’homme. Comme nous le voyons dans le verset de Micha 6, 8 :
הִגִּיד לְךָ אָדָם, מַה-טּוֹב; וּמָה-יְהוָה דּוֹרֵשׁ מִמְּךָ, כִּי אִם-עֲשׂוֹת מִשְׁפָּט וְאַהֲבַת חֶסֶד, וְהַצְנֵעַ לֶכֶת, עִם-אֱלֹהֶיךָ
« Il t’a dit homme, et qu’est-ce que D. exige de toi, uniquement que tu fasses le droit et l’amour du ‘Hessed, et que tu te comportes avec discrétion avec ton D. »
Et en vérité, c’est ainsi que la Création a été imprimée, qu’il n’y a aucun fait ni aucune action qui ne soit une action de ‘Hessed, et l’homme n’en a aucune conscience, et cela est dû à la cause indiquée par le Ramban, l’obturation du cœur et ce qui le recouvre.
Cette remarque nous éveille dans la Meguilat Routh au verset 1, 8 :
וַתֹּאמֶר נָעֳמִי לִשְׁתֵּי כַלֹּתֶיהָ לֵכְנָה שֹּׁבְנָה אִשָּׁה לְבֵית אִמָּהּ יַעַשׂה יְהוָה עִמָּכֶם חֶסֶד כַּאֲשֶׁר עֲשִׂיתֶם עִם־הַמֵּתִים וְעִמָּדִי
« Et Naomi dit à ses deux brus, allez, retournez chacune dans la maison de sa mère, que D. fasse du ‘Hessed avec vous comme vous avez fait avec les morts et avec moi. »
A première vue, nous ne trouvons pas de mention d’un quelconque acte de ‘Hessed qu’elles auraient
fait envers leurs maris dans toute la Meguilat Routh. Tout ce qu’on trouve, c’est qu’elles les ont épousés. Mais est-ce que le fait qu’une femme épouse son mari et leur vie commune est un acte de ‘Hessed ? Pourquoi est-ce qualifié de ‘Hessed ?
De même, verset 2, 11 : וַיַּעַן בֹּעַז וַיֹּאמֶר לָהּ הֻגֵּד הֻגַּד לִי כֹּל אֲשֶׁר־עָשִׂית אֶת־חֲמוֹתֵךְ אַחֲרֵי מוֹת אִישֵׁךְ « Et Boaz a répondu et lui a dit : on m’a raconté tout ce que tu as fait envers ta belle-mère après la mort de ton mari. »
A première vue, quel ‘Hessed a-t-elle donc fait avec Naomi ? Naomi elle-même n’a-t-elle pas insisté pour qu’elle s’en retourne, et Routh a agi pour son propre bien. Comment alors pouvons-nous considérer une action que l’homme fait pour lui-même comme une action de ‘Hessed ?
Et encore, verset 3, 10 :
וַיֹּאמֶר בְּרוּכָה אַתְּ לַיהוָה בִּתִּי הֵיטַבְתְּ חַסְדֵּךְ הָאַחֲרוֹן מִן־הָרִאשׁוֹן לְבִלְתִּי־לֶכֶת אַחֲרֵי הַבַּחוּרִים אִם־דַּל וְאִם־עָשִׁיר « Et il lui a dit : Bénie sois-tu par D. ma fille, ton dernier acte de ‘Hessed est encore meilleur que le premier… » Quel acte de ‘Hessed Routh a-t-elle accompli là ?
N’a-t-elle pas agi pour elle-même uniquement comme en témoigne le verset 3, 1 : וַתֹּאמֶר לָהּ נָעֳמִי חֲמוֹתָהּ בִּתִּי הֲלֹא אֲבַקֶּשׁ־לָךְ מָנוֹחַ אֲשֶׁר יִיטַב־לָךְ « Naomi sa belle-mère lui dit : ma fille, n’est-ce pas que j’espère pour toi un repos qui te sera bon ? »
Et comment pourrions penser qu’une action que l’homme accomplit pour son propre bien (pour se trouver un bon chiddoukh par exemple) serait un acte de ‘Hessed ? Celui qui médite à notre hypothèse comme quoi il est impossible d’appeler acte de ‘Hessed une action que l’homme accomplit pour son bien propre, pourra réaliser que c’est une erreur. Et le ‘Hovot Halavavot Chaar avodat Haelokim nous enseigne :
וכאשר נתבונן בטובות בני אדם קצתם אל קצתם אינן יוצאות מאחד מחמשה פנים : lorsque nous méditons aux bienfaits des êtres humains d’une extrémité à l’autre, ils ne sortent pas de l’un des cinq aspects,
האחד טובת האב על הבן
והשני טובת האדון על עבד
והשלישי טובת העשיר על הרש כדי לקבל שכר שמים
והרביעי טובת בני אדם קצתם לקצתם לקנות השם והכבוד ולגמול העולם
והחמישי טובת החזק על החלש בעבור חמלתו עליו ושהוא כואב על ענינו
L’un d’entre eux est le bienfait du père envers son fils, etc.
Et nous devons maintenant approfondir l’intention de tous… n’est-elle pas dépendante d’un intérêt… le bienfait du père envers son fils. C’est bien connu qu’il y recherche son intérêt propre, car le fils est un morceau du père, etc. Et tu verras qu’il est encore plus sensible à son égard qu’à son propre corps, etc. et on voit déjà de ce que nous avons dit en introduction que l’intention de tout bienfaiteur envers son prochain recherche son intérêt etc. Malgré tout, cela n’empêche pas de les louer, de leur être reconnaissant dans la crainte et l’amour qu’on ressent pour eux (les parents). Et si c’est ainsi, alors combien s’impose à l’homme le Service de louer et d’être reconnaissant envers Celui qui crée le bienfait, et qui nous gratifie sans limite de ses bienfaits, mais au contraire ils sont permanents et se prolongent sans intention d’intérêt, etc.
Nous comprenons habituellement son enseignement ainsi : quoiqu’il arrive, l’homme reçoit des bienfaits.
En vérité, si nous réfléchissons, nous allons voir que nous n’avons pas besoin de cela. Car toute notre hypothèse qu’une action que l’homme accomplit pour son bien propre n’est pas un acte de ‘Hessed, c’est une erreur. Par exemple : la Mitsva de Tsedaka. Evidemment que c’est un acte de ‘Hessed. Les Sages ont enseigné dans la Guemara Pessa’him 8a que celui qui dit « je vais donner de la Tsedaka pour que mon fils vive », c’est un juste parfait, et son acte est bel et bien un acte de ‘Hessed, bien qu’il le fasse pour un intérêt personnel, car l’intention n’amoindrit pas l’acte. Cependant, on pourra discuter avec lui sur la dimension de « Lichma » (acte désintéressé) mais en ce qui concerne le sujet de ‘Hessed, il n’y a là aucun déficit. Et encore, d’où cela nous vient-il qu’il serait interdit d’accomplir un acte de ‘Hessed pour son intérêt personnel, pourtant nous voyons bien que le juge dont tous les actes ne sont que des actes de ‘Hessed comme ils ont dit dans la Guemara Chabbat 10a :
כל דיין שדן דין אמת לאמיתו אפילו שעה אחת מעלה עליו הכתוב כאילו נעשה שותף להקדוש ברוך הוא במעשה בראשית
« Celui qui rend un jugement de vérité envers son prochain, ne serait-ce qu’un seul instant, devient l’associé de D. dans l’acte de la Création. » Et malgré cela, il a le droit de prendre un salaire pour le temps qu’il a pris pour juger. Donc bien qu’il prenne un salaire pour son action, cela ne diminue pas l’acte de ‘Hessed. Et donc, s’il en est ainsi, nous faisons vraiment erreur lorsque nous pensons que le commerçant qui est occupé du matin au soir à son commerce et en tire sa subsistance, cela n’est pas du ‘Hessed. Car étant donné que l’action en elle-même, c’est une évidence que c’est un acte de ‘Hessed : un homme qui marcherait nu, pieds nus et affamé, et celui-là vient le nourrit, le fait boire et le vêtit, n’as-tu pas de plus grand ‘Hessed que celui-là ? Que nous importe si en même temps il en tire des gains ? Et où trouvons-nous qu’il est interdit de profiter nous-même de notre acte de ‘Hessed ? On peut tout de même avoir l’intention de faire avec cela un acte de ‘Hessed.
Si un homme regarde le monde avec cette optique, il verra que la Création toute entière, tous ses actes et réalisations, toutes ses activités, ne sont que des entreprises de « ‘Hessed ». Et selon cela, il est évident que le fondement de toutes les Mitsvot entre l’homme et son prochain, c’est bien le ‘Hessed. Et même le fondement des Mitsvot entre l’homme et D., c’est le ‘Hessed. Sauf qu’il faudra rajouter un petit supplément, c’est que là le ‘Hessed sera avec le Créateur si l’on peut s’exprimer ainsi « לעשות נחת רוח ליוצרו », causer une satisfaction à son Créateur, et n’est-ce pas là en vérité le fondement de toute la Création ?
Sur le fondement des sacrifices, les Sages ont enseigné (rapporté par Rachi à propos du verset Lévitique 1, 9) : ריח נחוח נחת רוח למי שאמר ונעשה רצונו « Un arôme agréable pour Celui qui a dit faisons, et Sa volonté a été faite ». Et cela est le fondement de l’homme. Cela signifie effectivement que tout le fondement de la Création est de faire du « ‘Hessed » avec le Créateur, si l’on peut s’exprimer ainsi. Nous avons expliqué dans un autre cours l’enseignement du Ram’hal selon lequel D. a voulu faire du bien à ses créatures car le fondement de toute la Création c’est que l’homme doit se rendre apte à ce que le Créateur puisse lui faire du bien.
Dans les lois des Cohanim nous trouvons le verset Lévitique 26, 3-4 :
אִם-בְּחֻקֹּתַי, תֵּלֵכוּ ; וְאֶת-מִצְוֺתַי תִּשְׁמְרוּ, וַעֲשִׂיתֶם אֹתָם. וְנָתַתִּי גִשְׁמֵיכֶם, בְּעִתָּם; וְנָתְנָה הָאָרֶץ יְבוּלָהּ, וְעֵץ הַשָּׂדֶה יִתֵּן פִּרְיו
« Si vous allez dans mes décrets et vous gardez mes commandements et les accomplissez. Je donnerai vos pluies en leur temps ; et la terre donnera sa récolte et l’arbre du champ, son fruit. » אִם (si), dans le sens de demande, le Créateur béni-soit-il nous demande de suivre ses lois afin de pouvoir nous prodiguer du bien. Et c’est ce que nous avons expliqué dans les cours précédents, que le fondement de la Tora, ce sont des règles générales et des détails, et nous avons expliqué que le ‘Hessed, c’est un « כלל », une règle générale, car effectivement ce qui engendre et crée toute la Tora, c’est « ‘Hessed ».
Les Sages ont enseigné dans la Guemara Sota 14a : תורה תחילתה גמילות חסדים וסופה גמילות חסדים « La Tora commence par de la bienfaisance, et se termine par de la bienfaisance ». Explication : lorsque l’on voit un sujet de débat et de recherche qui se termine par le même sujet par lequel il a commencé, c’est la preuve que toute la discussion porte sur ce même sujet. La Tora commence par de la bienfaisance (D. crée le monde, et s’occupe d’Adam et Eve, les nourrit, les vêtit, etc.) et se termine par de la bienfaisance (D. enterre Moshe Rabbénou), car la racine de toute la dialectique et de toute la discussion contenue dans la Tora, c’est « ‘Hessed ». Si l’on approfondit bien la Sainte Tora, on verra que son fondement est « ‘Hessed ». Comme exemple les משפטים, les lois juridiques : un des principes de base des lois juridiques, ce sont les acquisitions, qui a priori n’ont rien à voir avec le ‘Hessed. Mais celui qui réfléchit verra qu’en vérité le fondement des acquisitions, c’est le ‘Hessed. Car, en réalité, le sujet de « propriété », et de « à lui », dont D. a gratifié l’homme, provient de la dimension de ‘Hessed, du principe fondamental : « רצה הקב״ה להטיב עם בריותיו ». « D. a voulu être bon avec ses créatures ». Ceci d’après la démarche du Ram’hal qui explique que tout le sujet du Service humain a pour but de lui éviter de manger le pain de la honte (שלא יאכל נהמא דכיסופא). Car celui qui mange le pain que son copain lui a donné, il a peur de le regarder en face. Et il a écrit : a été donné à l’homme le sujet des acquisitions et de « à lui », afin qu’il ressente qu’il mange le fruit de son travail. Et dans ce domaine, il y a une grosse erreur qui s’est répandue dans notre génération, c’est le système d’annulation de la propriété (communisme) qui a toute l’allure d’un système élevé et sublime, et nombreux sont ceux qui s’enflamment pour ce système. Mais à dire vrai, il est extrêmement erroné, sans même parler des avantages et des inconvénients particuliers de ce système. Car des avantages et des inconvénients apparaissent avec le temps dans tous les modes de vie, et si nous sommes attentifs à leurs dégâts, le système le plus « pur » a ses défauts. Mais en scrutant l’essence même de ce système sans regarder l’apparence qu’il prend dans sa réalisation concrète, il est clair qu’après une longue journée de travail et de labeur, l’homme qui doit se tenir debout et attendre qu’on lui fixe la somme de ses gains, tout le plaisir que ressent celui qui mange du fruit de son travail a disparu. Après tout son labeur, il ressent qu’il mange נהמא דכיסופא (le pain de la honte). Et bien sûr que dans une telle vie, les dégâts seront plus importants que dans une vie d’« acquisitions », car véritablement les « acquisitions » sont parmi les bienfaits les plus grands.
Le fondement et la base qui entourent tout est « ‘Hessed ». Le fondement de la Tora est « ‘Hessed ». Le fondement de la Création est « ‘Hessed ». L’homme réside toute la journée dans le ‘Hessed. Tous ses gestes et toutes ses réalisations sont des actes de ‘Hessed. Tout commerce, toute activité humaine commune, tous sont construits sur le ‘Hessed. Car c’est bien ainsi qu’a été imprimée toute la Création. Et avec une seule pensée stupide, l’homme gomme tout, avec la réflexion superficielle qu’il fait tout cela pour son bien propre, cette réflexion-là a gommé tout le fondement de la Création, tout est englouti et a disparu avec cette pensée-là. A ce sujet, il convient de rapporter ici l’expression des Sages dans la Guemara Baba Batra 16a : « הופך קערה על פיה », « il renverse la marmite à l’envers », c’est-à-dire qu’en renversant la marmite, il renverse de nombreux édifices, et cela est terrifiant ! Car véritablement l’homme est imprégné entièrement de « ‘Hessed ». הֵיטַבְתְּ חַסְדֵּךְ הָאַחֲרוֹן מִן־הָרִאשׁוֹן , ton dernier bienfait est encore meilleur que le premier : ce grand ‘Hessed-là est tout simplement son Chiddoukh avec Boaz, cet acte simple-là, est vraiment un acte de ‘hessed. Et à quel point c’est effrayant, qu’après tout cela, lorsqu’on demandera à quelqu’un où le ‘Hessed nous a été ordonné dans la Tora, il va hausser les épaules comme s’il n’en savait rien. La lecture de la Meguilat Routh à Chavouot nous montre que le fondement de la Tora et son essence, c’est « ‘Hessed ».
« La Tora commence par du ‘Hessed, et la Tora termine par du ‘Hessed. »
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