Rav Masharshia nous enseigne (‘Houlin 69a et 75b) que si un taureau Ben Pakou’ha va avec une vache qui ne l’est pas, si nous pensons comme l’avis qui dit que l’on prend en compte l’ascendant du géniteur pour les animaux, le petit n’a pas de Takana, de réparation. En effet du fait du géniteur il ne nécessite aucune She’hita, donc les Simanim ne sont pas des Simanim, et du côté de la génitrice il faut une She’hita.
Shoul’han Aroukh au chapitre 13 de Yoré Déah paragraphe 4 :
בן ט’ חי שנמצא במעי שחוטה כשרה וגדל ובא על בהמה דעלמא והוליד אותו הולד אין לו תקנה בשחיטה ואם בא על בת פקועה כיוצא בו והרי בנו ובן בנו עד םוף כל הדורות כמוהו וכלם צריכים שחיטה מדבריהם ואין הטרפות פוסל בהם.
‘On a fait une She’hita forme d’une vache qui n’est pas Tréfa (voir Shakh sur ce point) et l’on a trouvé en elle un veau de neuf mois, à terme, vivant. Si ce veau grandit et s’accouple avec une vache qui n’est pas Ben Pakouha comme lui, le petit qui naitrait des deux n’a pas de possibilité d’être permis lui-même par une She’hita. S’il va avec une Ben Pakouha comme lui, le petit qui naitrait, ainsi que le petit du petit jusqu’à la fin des générations lui sont identiques, nécessitent une She’hita rabbinique mais aucune Tréfout, aucune lésion, n’a d’incidence pour les disqualifier de la consommation.’
Le Shakh au paragraphe 14 relève l’expression du Shouk’han Aroukh : ‘Le petit qui naitrait des deux n’a pas de possibilité d’être permis lui-même par une She’hita’
Cette expression signifie que si le Ben Pakouha est allé avec une vache qui ne l’est pas, que l’on fait la She’hita de la mère et que l’on trouve en elle ce petit fruit de leur accouplement, ce petit est Casher comme tout Ben Pakouha, car il reçoit la She’hita effective par sa génitrice et aussi par son géniteur puisque celui-ci était Ben Pakouha.
En passant, nous voyons de ce langage du Shakh, tiré de Rashi, que le Ben Pakouha est considéré avoir reçu une She’hita.
Le Shakh rapporte l’innovation suivante du Beth ‘Hadash (sur le Tour au même chapitre) :
Il en sera de même si un taureau non Ben Pakouha va avec une vache Ben Pakouha, le petit que l’on aura trouvé à l’intérieur de cette vache une fois qu’on lui aura fait une She’hita d’ordre rabbinique sera Casher du fait que sa mère est Cashère. Le Shakh conteste cette décision.
Quel est le problème ?
Un taureau qui n’est pas Ben Pakouha s’accouple avec une vache Ben Pakouha, le petit né de cette union n’est pas consommable car, étant donné que d’un point de vue Halakhique nous prenons en compte l’ascendant aussi, ce petit nécessite, du fait de son géniteur, She’hita, or la génitrice étant Ben Pakouha la She’hita, quoique exigée d’un point de vue rabbinique, n’a pas de sens. Par contre, et là réside l’innovation du Beth ‘Hadash, si l’on fait la She’hita rabbinique à la génitrice, et que l’on trouve en elle un petit fruit de l’union avec un taureau non-Ben Pakouha, ce petit est Casher du fait que la mère est Cashère sans She’hita (d’après la Torah) donc ce qui est en elle est Casher. Le Shakh conteste et dit que l’on a toujours vu dans ce sujet que le petit dans le ventre est permis par la Sheh’ita de la mère or ici il n’y a aucune She’hita pour rentre consommable le petit. Je ne comprends pas cette question du Shakh. En effet toute l’innovation du Beth ‘Hadash est fondée sur la démarche de Rashi qui affirme dans le Din de Rav Masharshia que le Ben Pakouha lorsqu’il est dans le ventre de sa mère qui a reçu la She’hita est considéré comme si lui-même avait reçu la She’hita, donc cette vache Ben Pakouha a reçu ce qui la rend Cashère, donc le petit qui se trouve en elle est Casher.
Le Beth ‘Hadash prouve textuellement sa démarche de la Guemara dans ‘Houlin 75b de la seconde réponse d’Abayé. Regardons cette preuve.
La Mishna dans ‘Houlin 74a et b rapporte un débat entre ‘Hakhamim et Rabbi Shimon Shezouri. La conclusion (75b) de leur débat est que d’après ‘Hakhamim si le Ben Pakouha s’est posé sur ses sabots sur le sol il faudra lui faire une She’hita d’ordre rabbinique de peur que l’on confonde et que l’on en vienne à manger d’un animal sans She’hita. D’après Rabbi Shimon Shezouri, il n’y a pas cette institution rabbinique.
Comme cette She’hita est d’ordre rabbinique pour qu’on ne confonde pas, si le cas de ce Ben Pakouha sort de l’ordinaire il sera permis de le manger sans She’hita. Il y a débat sur ce point dans la Guemara (75b):
אמר אביי הכל מודים בקלוט בן פקועה שמותר מאי טעמא בל מלתא דתמיהא מידבר דכירי לה אינשי. איכא דאמרי אמר אביי הבל מודים בקלוט בן קלוטה בן פקועה שמותר מאי טעמא תרי תמיהי מידבר דבירי אינשי.
‘Abbayé dit : tout le monde est d’accord (c’est-à-dire ‘Hakhamim et Rabbi Shimon Shezouri) qu’un Ben Pakouha qui a les sabots collés (c’est-à-dire non-fendus, donc d’un seul bloc) qu’il est permis sans She’hita car toute chose étonnante frappe l’imagination et les gens ne confondent pas. Certains donnent une autre version de l’enseignement d’Abbayé : tout le monde est d’accord (c’est-à-dire ‘Hakhamim et Rabbi Shimon Shezouri) qu’un animal qui a les sabots collés fils d’une vache qui a les sabots collés Ben Pakouha qu’il est permis sans She’hita, en effet deux éléments étonnants frappent l’imagination et les gens ne confondent pas.’
Le second cas est exprimé de manière assez ambiguë, et soulève débat. Nous avons volontairement traduit mot à mot pour soulever la difficulté : ‘un animal qui a les sabots collés fils d’une vache qui a les sabots collés Ben Pakouha’. L’ambiguïté est la suivante : le terme Ben Pakouha écrit à la fin s’applique à la première proposition ou bien à la seconde proposition ? Rashi prend la seconde option, ce qui est le plus rigoureux dans le texte. C’est-à-dire que l’on parle d’un petit qui a les sabots collés et que l’on a trouvé dans les entrailles d’une vache qui elle-même a les sabots collés et qui est elle-même Ben Pakouha. Donc d’après Abbayé ce petit n’a pas besoin de She’hita même d’un point de vue rabbinique.
Mais cette vache Ben Pakouha qui a les sabots collés, comment a-t-elle été fécondée ? N’est-ce pas par un taureau normal qui n’est pas Ben Pakouha ? Nous voyons donc d’ici qu’un petit Ben Pakouha fruit de l’union d’un taureau normal et d’une vache Ben Pakouha est Casher bien que l’on n’ait fait aucun acte significatif sur sa génitrice. Il y a deux manières d’expliquer cette permission. La première est de dire, comme nous l’avons dit plus haut, que la génitrice étant elle-même Ben Pakouha est considérée, selon la démarche de Rashi, comme si elle a reçu la She’hita (de sa mère) bien qu’elle soit vivante et gambade dans les champs. Ceci étant posé, le Ben Pakouha de cette vache Ben Pakouha est considéré comme ayant reçu la She’hita de sa grand-mère. Nous pouvons aussi expliquer, et le Beth ‘Hadash va dans ce sens comme cela ressort de son langage, qu’étant donné que la génitrice de ce second Ben Pakouha est elle-même Ben Pakouha, nous apprenons du verset (Devarim 14,6) כל בבהמה תאכלו, « tout dans l’animal vous mangerez » que si la mère est Cashère, ce qui est dans la mère est Casher.
Le Shakh conteste complètement cette lecture de Rashi dans 75b comme il le développe au paragraphe 6 du chapitre 13, et explique que lorsque la vache est Pakouha, Rashi ne dit pas qu’elle est Ben Pakouha. Elle est Pakouha, c’est-à-dire qu’elle a été fendue et que l’on a trouvé en elle un petit qui a les sabots collés, et qu’elle-même avait les sabots collés, ce qui signifie qu’elle n’était pas elle-même Ben Pakouha. Donc d’après cette lecture de Rashi, la preuve textuelle du Beth ‘Hadash tombe.
Au niveau de l’analyse du sujet, d’après le Beth ‘Hadash (et le Lvoush, cité par le Shakh), si la vache a reçu la She’hita à un moment ou un autre, ce qui est dans l’animal, ou bien ce qui viendra plus tard dans l’animal est permis sans She’hita. D’après le Shakh, c’est la She’hita présente de la mère qui rend Casher ce qui est en elle, et non ce qui viendra prospectivement dans la mère.
(1) Selon la Drasha élaborée dans ‘Houlin 69a.