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Pourquoi tant de plaies ?

par: Jacques Benhamou

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Sept plaies sur dix nous sont racontées dans notre paracha. L’objectif de D. semble être de faire sortir les enfants d’Israël d’Égypte avec des richesses comme Il l’a promis à Avraham (Gen.15,14).

N’eut-il pas mieux valu alors que D. si prenne autrement, d’une manière plus éclatante ? Pourquoi tant de plaies ?

Après les doutes de Moché, à propos de sa mission, D. répète sa promesse de faire sortir les enfants d’Israël pour les conduire vers la terre promise. Les enfants d’Israël ne sont pas prêts à écouter Moché et à plus forte raison Pharaon lui-même, qui ne laissera pas échapper une masse si docile de travailleurs alors qu’il est le maître du pays. Moché hésite alors à s’engager dans sa mission pour deux raisons.

A cause de la première hésitation de Moché (Ch.6,12)[1], D. lui adjoint Aaron, son frère. Vient ensuite la liste des familles des chefs de tribus jusqu’à Moché. En quoi l’adjonction d’Aaron est-elle une réponse au problème de Moché ? Cette liste semble montrer que Moché à une place légitime dans la généalogie des enfants d’Israël et qu’il peut prendre la parole devant le peuple et devant Pharaon alors qu’il en doute. La première hésitation de Moché portait sur sa représentativité vis à vis d’Israël[2]. Le « peuple juif » était socialement organisé par leur rang de naissance, la réponse de D. est de lui adjoindre Aaron. Aaron devient donc le « visage social » de Moché. De facto, la structuration sociale de la société des enfants d’Israël est alors confortée par D.. Aaron était le fils de Amram, qui était chef du peuple au moment de la naissance de Moché (Sota 12a), Aaron, l’aîné, et Moché, le cadet d’Amram, ne font que prendre la relève de leur père.

Le texte poursuit par la seconde hésitation de Moché (Ch.6,30)[3]: Par quel argument Pharaon pourrait-il laisser sortir les enfants d’Israël d’Egypte ? D. va indiquer à Moché, au début du chapitre 7, le plan des événements à venir: Je te révèle ce qu’il faudra dire à Pharaon et Aaron se chargera de le dire. Moché ne devra en rien intervenir dans le plan divin, il se retient même de prier. D’ailleurs D. lui explique la raison des plaies à venir (Ch. 7,3-5):

ואני אקשה את לב פרעה והרביתי את אתתי ואת מופתי בארץ מצרים (ג

3) Et Moi j’endurcirai le cœur de Pharaon, Je multiplierai ainsi mes signes et mes prodiges en terre d’Egypte

ולא ישמע אלכם פרעה ונתתי את ידי במצרים והוצאתי את צבאתי את עמי בני ישראל מארץ מצרים בשפטים גדלים (ד

4) Alors Pharaon ne vous écoutera [toujours] pas alors Je m’imposerai à l’Egypte, je ferai sortir mes légions, mon peuple, les enfants d’Israël d’Egypte par de grands jugements

וידעו מצרים כי אני ידוד בנטתי את ידי על מצרים והוצאתי את בני ישראל מתוכם (ה

5) Alors l’Egypte reconnaîtra que Je suis D., par le fait de m’être imposé à l’Egypte, J’en ferai alors sortir les enfants d’Israël

Compte tenu du verset 5, il nous faut reformuler l’hésitation que Moché a à accepter sa mission: Comment Moché pourra-t-il convaincre Pharaon qu’il y a un D. si ce n’est en lui parlant ? Précisons qu’ici, le nom de D. employé est ידוד et pas אלקים, Moché devrait donc parler à Pharaon d’un dieu qui n’est pas une puissance qui rassemble des forces multiples (voir Rav Hirsch sur Gen.1,1)[4]. D. répond donc à la seconde hésitation de Moché: Pharaon reconnaîtra D. par les plaies et pas par des paroles. Les plaies ont donc une vertu éducative pour celui qui veut s’y intéresser.

La Michna de Pirqey avot chapitre 5 indique qu’il y a plusieurs occurrences d’un groupe de 10: les 10 paroles que D. dit pour créer le monde, les 10 générations d’Adam à Noé, les 10 épreuves d’Avraham, les 10 plaies d’Égypte et les 10 plaies sur la mer rouge, les 10 épreuves qu’Israël fit subir à D. dans le désert, les 10 miracles dans le temple, les 10 choses qui furent crées la veille de Chabbat de la création (les 10 paroles ne sont pas mentionnée par la michna !). Prenons le 10ème élément dans chaque groupe. La 10ème parole de la création du monde est, suivant Rabbi Eliézer: « Il n’est pas bon que l’homme soit seul » (Gen. 2,18), et pour les sages « faisons l’homme à notre image » (Gen. 1,26). La 10ème génération: Noé qui est en rupture avec ses pères comme il est dit: « Noé trouva grâce aux yeux de D. » (Gen.6,8), ce qui n’était pas le cas des générations précédentes. La 10ème épreuve d’Avraham: le non sacrifice de son fils, Itshak. La 10ème plaie d’Égypte: la mort des premiers-nés. La 10ème épreuve qu’Israël fit subir à D. dans le désert: la révolte des explorateurs (Bam. Ch. 13 et 14) qui se solde par la disparition de la génération de la sortie d’Égypte. Le 10ème miracle dans le temple: « personne n’a jamais dit qu’il manquait de place pour passer la nuit à Jérusalem ». La 10ème chose créée la veille du Chabbat de la création est les tables de la loi. Le point commun entre les 10ème choses est la notion de rupture de la manière d’être homme[5] . En effet, la création de l’homme à l’image de D. ou de la femme à partir de l’homme n’est pas faite à partir de la terre, comme pour les autres êtres vivants. Noé rompt avec ses prédécesseurs. Pour Avraham, l’héritier n’est pas l’aîné biologique, Ichmaël mais Itshak. Quant à la plaie de la mort des premiers-nés, elle est une entrave à la succession des valeurs portées par les premiers-nés. Pour la révolte des explorateurs, qui provoque la disparition des anciens esclaves sortis d’Égypte, c’est une rupture dans la mentalité des enfants d’Israël. Le 10ème miracle dans le Temple est une rupture dans l’instinct individuel, c’est le sentiment de fraternité. Pour la 10ème chose créée la veille du Chabbat de la création: les tables de la loi, c’est la finalisation de la libération des corps des esclaves par la libération des esprits, par le don de la loi: la Thora. (Exemple de Spartacus). Au travers des 10 plaies se rejouent les mêmes enseignements que les groupes de 10 de la Michna.

Pourquoi D. voudrait-Il que Pharaon le reconnaisse ? Et si Pharaon doit être convaincu, pourquoi les égyptiens devraient-ils souffrir des plaies ? Commençons par répondre à la seconde question. On pourrait imaginer que c’est la conséquence de la promesse de D. à Abraham: Gn. 15,14: « Finalement, je jugerai la nation qui les a asservis et elle [ta descendance] la quittera avec de grandes richesses ». Mais cet argument est insuffisant. L’Égypte devait payer le salaire des 210 ans d’esclavage à six cent mille esclaves, et ils devaient aussi rendre compte des assassinats de juifs. Or, le verset 4, parle de « grands jugements », il devrait y avoir seulement « jugement ». Dès qu’on rend un « grand jugement », ce n’est pas seulement pour juger mais au mieux pour l’exemple. Que voulait montrer D. en traumatisant les Égyptiens ? Avraham avait accepté qu’un peuple serait l’instrument d’oppression de sa descendance, dans ce cas l’Égypte est victime et accomplie même un ordre divin, en oppressant les enfants d’Israël. On peut résoudre partiellement la difficulté en relevant que les égyptiens ont outrepassé leur devoir. La « raison » leur commandait d’affaiblir des immigrés non expulsables[6], qui n’avaient pas de terre d’origine, en exploitant leurs forces de travail sous couvert de les écraser, ainsi l’Égypte s’est pervertie en économisant ses forces propres. Les plaies sont alors la réponse à cette hypocrisie de l’Égypte qui consiste à exploiter les enfants d’Israël. Pharaon est le représentant d’un peuple pervers et à ce titre il agit par ses propres moyens[7] (Rambam, Hil’hot Téchouva Ch. 6).

Pourquoi alors est-il nécessaire que le cœur de Pharaon soit endurci ? Dans le verset 5, l’objectif de D. est que l’Égypte Le reconnaisse comme D.. De ce point de vue, l’objectif est raté, après la libération, les égyptiens continuent à poursuivre les enfants d’Israël avec acharnement et aveuglement au point de s’enfoncer dans une mer prête à les engloutir. Même si on considère que l’épisode de la mer rouge fait partie des 10 plaies, les Égyptiens ne sont donc pas revenus aux croyances adoptées à l’époque de Yossef. Toute l’Égypte s’était convertie à la foi de Yossef et s’était circoncis (Rachi sur Ber. 41,55). Les égyptiens de l’époque de Moché n’ont pas fait un retour vers D.. D. dit à Moché que l’Égypte finira par Le reconnaître, bien que ce soit D. qui libère les enfants d’Israël. Comment alors se concrétise la reconnaissance de D. par l’Égypte, annoncée dans le verset 5 ? La succession des plaies, suivie de la poursuite sur le chemin de la mer rouge, prouvent que les égyptiens avec Pharaon en tête n’acceptent aucune leçon. Il faudrait peut être dire que l’Égypte traitera sa culpabilité plus tard, elle fera son mea culpa lorsque Israël sera partie depuis un certain temps d’Égypte. Puis avec le temps les traces de culpabilité disparaîtront totalement à l’échelle de la nation, comme on oublie les souffrances et les difficultés.

Pour le peuple juif, les traumatismes devraient disparaître aussi mais nous tentons de les garder bien vivants[8], pas du point de vue de la souffrance mais du point de vue des enseignements. Si la dimension destructrice du traumatisme est condamnée à disparaître, la dimension constructive du trauma est conservée religieusement. La fête de Pessa’h est la remémoration du traumatisme constructif de l’esclavage d’Égypte dans la mesure où il constitue un point de focalisation à partir duquel on peut se considérer comme juif.

Revenons aux « grands jugements » du verset 5. Les plaies servent essentiellement aux enfants d’Israël et l’Égypte en est le décor tout autant que les états d’âme de son roi. Prenons l’exemple de la dernière plaie de notre paracha, celle de la grêle. Elle nous permettra de déterminer l’enjeu de la reconnaissance de D. par Pharaon, c’est la raison pour laquelle l’Égypte n’a pas été balayée d’un seul coup.

La plaie de la grêle est introduite par un avertissement au Pharaon[9] (Ch. 9,14):

כי בפעם הזאת אני שלח את כל מגפתי אל לבך ובעבדיך ובעמך בעבור תדע כי אין כמני בכל הארץ

Car cette fois, j’enverrai toutes mes calamités à ton cœur [Pharaon] et à celui de tes officiers et de ton peuple, afin que tu saches qu’il n’y a personne comme Moi sur toute la terre.

« Toutes mes calamités » fait référence à la mort de premiers-nés (Rachi ad loc. Il ajoute que la dernière plaie était équivalente à toutes les autres plaies). La mort des premiers-nés constituait donc une sorte de résumé de l’enseignement des plaies. Il faut donc comprendre les avertissements aux plaies comme portant sur plusieurs d’entres elles. Ici sur les 4 dernières plaies d’après Rachi[10].

Ch. 9,16:

אולם בעבור זאת העמדתיך בעבור הראתך את כחי ולמען ספר שמי בכל הארץ

Cependant pour cela Je t’ai laissé survivre, pour que tu puisses voir ma puissance et que tu publies mon nom sur toute la terre.

Pourquoi Pharaon et son peuple n’ont pas été éliminés purement et simplement ? La réponse est donnée: Pour que les nations du monde, à la suite de la plus grande nation de son époque, reconnaissent le véritable Maître du monde[11]. Voilà le programme de l’histoire et de son eschatologie.

Revenons aux détails de cette plaie (Ch. 9,18):

הנני ממטיר כעת מחר ברד כבד מאד אשר לא היה כמהו במצרים למן היום הוסדה ועד עתה

Demain, au même instant, je ferai tomber une grêle très puissante, tel qu’il n’y en a jamais eu en Egypte dans le pays d’Egypte depuis qu’elle fut fondée jusqu’à ce jour.

Rachi relève l’emploi du mot « כעת – instant » qui n’est pas habituelle dans le langage des hommes, parce qu’il indique une précision qui n’est pas à l’échelle humaine (voir Rachi sur Ber.2,2: « seul D. connaît les « instants »)

כעת מחר – כעת הזאת למחר שרט לו שריטה בכותל למחר כשתגיע חמה לכאן ירד הברד

« Demain, au même instant »: Comme à cet instant précis demain, il le désigna en traçant une entaille sur le mur et demain lorsque le soleil arrivera à cette trace, s’abattra la grêle.

La mort des premiers-nés arrive précisément à minuit, Moché craignant une erreur des « horloges solaires nocturnes » précise « demain vers minuit », tandis qu’ici Moché exprime une maîtrise parfaite du temps. Dans le verset 22, Rachi souligne que Moché exprime à Pharaon que D. maîtrise les forces de la Nature נטה את ידך על השמים « étends ton bâton sur le ciel »; l’expression « sur le ciel » est étonnante, Rachi relève: מדרש אגדה הגביהו הקב »ה למשה למעלה מן השמים Le midrach précise que D. plaça Moché au dessus des cieux » donc comme maître de la météo, science statistique à l’échelle humaine vu sa complexité.

Ch. 9,24:

ויהי ברד ואש מתלקחת בתוך הברד כבד מאד אשר לא היה כמהו בכל ארץ מצרים מאז היתה לגוי

Il y eut la grêle et le feu mélangés dans les grêlons. [Une grêle] extrêmement forte telle qu’il n’y en a jamais eu dans le pays d’Egypte depuis qu’elle fut fondée comme nation.

Rachi sur ce verset (ainsi qu’Ibn Ezra):

(מתלקחת בתוך הברד – נס בתוך נס האש והברד מעורבין והברד מים הוא ולעשות רצון קונם עשו שלום ביניהם (ש »ר

« Mélangés dans les grêlons »: Miracle dans un miracle; 1) le feu et la grêle se sont imbriqués l’un dans l’autre (alors que l’un monte et l’autre tombe). 2) La grêle est de l’eau et le feu ont fait la paix pour accomplir la volonté de leur Maître. (Chemot Rabba)

Dans un premier temps la grêle doit nous apprendre que lorsque des contraires s’unissent, cela montre qu’ils relèvent d’une même source et montre l’existence du Créateur parce que l’homme n’en perçoit que rarement l’unité dans la mesure où ce monde est une s’exprime dans la diversité éparpillée et contradictoire (thème très souvent exprimé chez le Maharal).

Finalement Moché et son D. apparaissent incompréhensibles à Pharaon parce qu’Il maîtrise le temps, la météo avec précision et même des contraires naturels comme l’eau et le feu. Moché montre que D. dépasse la science rationnelle dans sa nature et ses limites[12]. Pharaon l’admet et exprime, non pas sa soumission à une force physique qui l’oppresse, mais sa soumission à une puissance morale. L’usage des termes: חטאתי/j’ai fauté, הצדיק/juste et הרשעים/méchants dans son langage le prouve (Ch. 9,27): וישלח פרעה ויקרא למשה ולאהרן ויאמר אלהם חטאתי הפעם ידוד הצדיק ואני ועמי הרשעים « Pharaon envoya chercher Moché et Aaron. Il leur dit: Cette fois je suis coupable et D. est juste, c’est moi et mon peuple qui sommes méchants». C’est parce que Pharaon, l’espace d’un instant, fait Téchouva (et ne se perçoit pas comme le dieu) que Moché doit s’éloigner des idoles et sortir de la ville pour prier D. de faire cesser la plaie. Dans les autres plaies, c’est dans la ville que Moché prie D. de faire cesser la plaie. Pourquoi n’a-il pas éprouvé le besoin de sortir de la ville aussi ? Alors qu’avant ces idoles n’étaient rien d’autre que des statues pour un Pharaon qui se prenait pour un dieu mais qui savait qu’il était un homme, elles deviennent sur le moment la vraie représentation des dieux et donc de véritables idoles.

[1] ואני ערל שפת … וידבר משה לפני ידוד לאמר הן בני ישראל לא שמעו אלי « Moché dit devant D. (coupa la parole à D. plus exactement): si déjà les enfants d’Israël ne m’ont pas écouté … De plus, je ne peux pas m’exprimer (Rachi) »

[2] Le texte donne l’argument de Moché en 6,12: ואני ערל שפתים « et moi j’ai les lèvres incirconcises » qui signifie donc « je n’ai pas de place légitime parmi les enfants d’Israël »

[3] ויאמר משה לפני ידוד הן אני ערל שפתים ואיך ישמע אלי פרעה « Moché dit devant D. (coupa la parole à D. aussi): je ne peux pas m’exprimer, alors comment Pharaon m’écoutera-t-il ?

[4] Après la plaie de la grêle Moché retourne chez Pharaon et lui indique que malgré le caractère exceptionnel de cette plaie, l’objectif de la reconnaissance de D. comme ‘יה n’est pas atteint: (Ch. 9,30) ואתה ועבדיך ידעתי כי טרם תיראון מפני ידוד אלהים « Je sais que toi et tes serviteurs ne craignent pas encore ידוד אלהי ». Il s’agit de D. en temps qu’il dépasse la Nature. Pharaon pensait sûrement le D. de Moché comme אל׳ הוה ה׳ (D. soumis à la Nature) et pas comme ה׳ הוה האל׳ (Nature soumise à D.). Nous reverrons ce point sous un autre aspect plus loin.

[5] Pour Pharaon cette possibilité n’existe pas

[6] Les égyptiens et les habitants de Canaan sont des descendants de ‘Ham par rapport aux descendants d’Avraham issu de Chem. L’Egypte ne pouvait faire se cadeau empoisonné à leurs frères.

[7] C’est le principe général de אין שליח לדבר עבירה « il n’y a pas d’intermédiaire pour une faute » (Kidouchin 42b). Autrement dit chacun est responsable de ses actes mais ne peut être condamné que parce qu’il a la liberté de se plier aux ordres comme le prouvent les cavaliers égyptiens de la mer rouge qui dans un pays dévasté suivent encore leur pharaon sans discuter. On peut remarquer que dans la mer rouge furent précipités chevaux et cavaliers. Si les cavaliers ont fauté, les chevaux qu’ont-ils commis ? En fait rien, ils sont le moyen du mal et sont à éliminer pour cela. Les chevaux n’ont pas le sens du bien et du mal.

[8] Pour les juifs, en temps que peuple, la mort est source d’impureté. Les prêtres juifs s’éloignent de la mort qui rend impure. Au contraire des autres religions où le prêtre règle le rapport avec l’au-delà, avec le monde des morts. Par exemple, un tribunal ne peut infliger la peine capitale que si le grand tribunal de Jérusalem siège à sa place, c’est à dire prêt de l’endroit où officient les prêtres parce qu’eux sont en charge des sacrifices qui acquittent l’homme juif de sa culpabilité (je fais très rapide). La mort ne peut être infligée que par des gens qui savent ce qu’est la vie au contact de gens qui ne sont préoccupés que par la vie et pas la survie dans l’attente de la mort.

[9] La plaie du sang (n°1), des bêtes sauvages (n°4) et de la grêle (n°7) sont précédées d’un avertissement. Il y a 3 groupes de plaies: les 3 premières, les 3 suivantes et les 4 dernières.

[10] Pour Ibn Ezra, Rachbam, Rabbénou Be’hayé et d’autres, la plaie de la grêle est particulière parce qu’elle regroupe de nombreux cataclysmes pour l’Égypte: feu, grêle, météores, soufre, neige, brumes, qui s’abattent sur les hommes, les animaux, les arbres et les récoltes.

[11] A l’image de Yossef qui parle toujours de D., disant au Pharaon de son époque qu’il est second par rapport à D. de qui lui vient son intelligence (Gn. 41,16). Il me semble apprendre d’ici qu’on parle beaucoup de D. avec des non-juifs, c’est-à-dire de théologie, moins avec des juifs et que les non-juifs ont tendance à se consacrer à la théologie. Ainsi Yossef initie Pharaon à l’existence de D.. Reviendra à Pharaon de faire la « promotion » de l’idée au monde entier pour laisser Israël à d’autres préoccupations, peut-être promouvoir la grandeur de l’homme face à D. soit à la manière du moussar qui appelle l’homme à la grandeur en lui montrant sa petitesse, soit à la manière de la ‘hassidoute et lui montrant sa grandeur. Il existe une troisième voie: en lui montrant sa profondeur et sa complexité (accessible par l’étude).

[12] Le monde grec a hérité sa vision sans cieux des cieux השמים שמי de l’Egypte. Le ciel tire son nom de la juxtaposition de אש/feu et מים/eau d’après Rabbi Yo’hanan dans le midrach, Ber. Rabba. C’est le lieu où les contraires peuvent subsister parce que le Créateur l’ordonne. Ainsi les grecs à l’époque de Hanoukka ont interdit la proclamation de la néoménie parce qu’Israël a reçu du Créateur le droit d’ordonner au temps (Si un ciel nuageux ne permet pas la vision de la nouvelle lune, la néoménie sera repoussée au lendemain; si la néoménie a été prononcée pas une erreur plausible, le nouveau mois est consacré. Ainsi les juifs « dictent le temps » aux astres et non l’inverse; voir Beïtsa 17a et Rachi sur רבי אומר אף חותם בה מקדש השבת ישראל והזמנים), or les grecs prônent l’indifférence des espaces (ils percent les murailles du Temple pour le désacraliser pour tous, la soumission aux temps (interdiction de la proclamation de la néoménie), aux pulsion libidinales (interdiction de la circoncision) et au pulsions religieuses libres (interdiction du chabat et idolâtrie obligatoire pour tous et partout).

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