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Les bikourim et le service de D.

par: Rav Raphaël Bloch

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Devarim Chapitre 26 verset 1 : « Et ce sera, lorsque tu viendras vers la terre qu’Hachem ton D. te donne en héritage, lorsque tu auras pris possession et que tu y seras installé. »

Verset 2 : « Tu prendras des prémices de tous les fruits de la terre que tu apporteras de ton pays qu’Hachem ton D. te donne et tu les placeras dans un panier et tu iras vers l’endroit que choisira Hachem ton D. pour y faire résider son nom. »
Verset 5 : « Et tu viendras vers le Cohen qui sera dans ce temps là et tu lui diras : « je déclare aujourd’hui à Hachem ton D que je suis venu vers le pays qu’Hachem avait juré à nos pères de nous donner » .»

Dans ce troisième verset, deux difficultés surgissent : d’abord pourquoi nous préciser à propos du Cohen que celui-ci sera « en ce temps là » et surtout l’expression utilisée « d’Hachem ton D. pourrait presque se comprendre « ton D. et pas le mien » alors qu’à maintes reprises dans les versets précédents et suivants, la Torah nous parle en disant : « Hachem ton D ». Cette question est d’autant plus forte que le thème de la mitsva de bikourim est justement la notion de reconnaissance, ainsi que le souligne Rachi dans notre verset. Quant à la première question concernant les mots « qui sera en ce temps là », Rachi nous explique cela : « tu n’as (à prendre en compte) que le Cohen qui est à ton époque tel qu’il sera ». La réponse de Rachi semble signifier que nous n’avons pas à nous poser de question sur le niveau du Cohen présent même s’il nous paraît moins méritant que ses prédécesseurs. Cette idée existe déjà à propos du juge, où nous trouvons des termes similaires (Devarim Chap. 17 verset 9). Mais pour autant que cela paraît justifié, quand il s’agit de consulter un juge, de préciser qu’il est de notre devoir d’accepter son autorité malgré ses compétences moindres que celles qu’on aurait pu espérer, autant cela paraît incongru en ce qui concerne le Cohen qui n’a comme tâche que d’accomplir son sacerdoce (Voir Ramban).

Le Sforno nous présente une explication intéressante en liant nos deux difficultés. Ce serait justement parce que nous devons dire au Cohen : « Hachem ton D. » qu’il pourrait être déplacé de le déclarer à un Cohen qui ne serait pas assez méritant. Et c’est alors que la Torah nous dit : peu importe ! Dans cette action d’apporter les bikourim comparable sà un cadeau à D. qui est le véritable propriétaire du sol, il est indiqué de le faire en parlant de manière honorifique.

Néanmoins, la première question n’est pas vraiment résolue. Au contraire il eut été plus cohérent de dire « Hachem mon D », plutôt que de justifier, comme le commente le Sforno, cette expression envers un Cohen qui n’en est pas vraiment digne. Une réponse nous est proposée par Alcheikh et nous allons essayer d’en dégager l’idée principale. La Mitsva de bikourim est éminemment pédagogique. L’instinct humain est de se sentir propriétaire de ses biens, à plus forte raison en est il ainsi de agriculteur qui enfin voit pousser ses fruits. Alors qu’en réalité le véritable propriétaire n’est autre que D. qui, non seulement, lui laisse la jouissance de la terre mais donne également le vent, la rosée et la pluie afin que poussent les végétaux. Mais tout cela n’existe comme le monde dans son intégralité que pour que l’homme loue son Créateur. Pour nous aider à réaliser ce projet, il nous est demandé, au riche comme au pauvre, de prendre les premiers fruits et de les porter sur l’épaule jusqu’à l’endroit où Hachem réside, et de lui en faire offrande.

Or comme toute pédagogie, celle-ci est progressive. Dans un premier temps, le juif se revendique comme le descendant des patriarches à qui D a juré de donner la terre d’Israël. Il peut donc penser que c’est un droit acquis. A ce stade la Torah nous dit : ce n’est pas encore ton D. C’est le D. du Cohen, même s’il n’est pas suffisamment méritant. Ainsi s’explique la deuxième déclaration qui suit dans les prochains versets où nous racontons toutes les grâces qu’Hachem a accompli en nous sortant d’Egypte (avant le temps strictement accompli). Ainsi s’achève, au verset 10, ce protocole. Et maintenant voilà que j’ai apporté les prémices des fruits de la terre que tu m’as « «donnée » Hachem et tu le poseras devant Hachem ton D. et tu te prosterneras devant Hachem ton D. Dans ce texte, il n’est plus question de droit, mais bien d’un cadeau qu’Hachem nous fait. Maintenant, Hachem est ton D.

Le Midrach Rabba nous enseigne, à propos du mot « Bereichit » par lequel commence la Torah : « pour Reichit signifie pour les bikourim , le monde a été créé pour les bikourim. » Le commentaire du Alchikh nous inspire la réflexion suivante : la terre d’Israël est le lieu de « l’existence » par excellence. La pédagogie dont la Torah fait preuve à propos des bikourim ne doit-elle pas être appliquée dans notre positionnement dans notre vie en tant que juif ? Ne devons-nous pas dépasser le stade initial de dépositaires de l’alliance contractée avec nos ancêtres. Il faut aller plus loin, plus haut en personnalisant notre relation avec Hachem et alors seulement, Hachem sera notre D

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