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Le chabbat et le tabernacle

par: A. Medioni

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Elé Pékoudé HaMishkan : « voici les comptes du tabernacle ». Cette parasha commence avec un recensement, une énumération, un compte de toutes les offrandes et de tous les ustensiles du culte. Cette tâche nous dit Rachi (38, 21) incombait à la tribu de Lévi.

Le compte, c’est la matérialité. On compte l’or, l’argent, le cuivre etc. La spiritualité, c’est ce qui ne se compte pas. Par exemple, on ne compte pas la emouna, la yirat chamaïm… D’où la question qu’on peut se poser sur ce mishkan : comment percevoir cette résidence d’Hashem dans sa dimension spirituelle puisque le texte la présente d’une façon « très » matérielle à travers tous ces comptes de matériaux utilisés ?

La plupart des années, la parashat Pékoudé se lit avec Vayakhel, sa « sœur jumelle », parasha qui détaille la construction du mishkan. Mais le début de parashat Vayakhel met d’emblée une limite à cette matérialité extrêmement détaillée (dans les versets de la parasha). Cette limite est celle du chabbat puisque « pendant six jours sera fait le travail » (35, 2). Préambule nécessaire, cette mise en garde vient avant même la construction nous dit Rachi afin de nous rappeler que cette construction ne « repousse » pas le chabbat. C’est donc bien le chabbat qui a l’antériorité sur le mishkan qui est tout de même le palais de Hashem. La matérialité est donc mise en perspective si l’on peut dire : elle est cadrée.

Cette idée est-elle propre au tabernacle ? Il semble qu’on puisse l’appliquer au chabbat lui-même. Le chabbat est lui aussi à la jonction de la spiritualité (rouh’niout) et de la matérialité (gachmiout), à l’image des repas de chabbat et du oneg chabbat (« délice de chabbat »). La guemara enseigne « Quiconque fait du chabbat un délice mérite un héritage sans limites »[1]. Le Rav Dessler rapporte un commentaire du Gaon de Vilna[2] : « Quiconque fait du chabbat un délice et non pas quiconque se délecte (lui-même) du chabbat, c’est-à-dire que la sainteté (kedoucha) du chabbat doit elle-même être notre délice ». Ou pour le dire de manière plus prosaïque, il ne s’agit pas juste de « kiffer »…

On comprend dès lors que le tabernacle est basé sur une matérialité qu’on doit élever. Cette élévation de la matière que le Juif doit vivre dans le chabbat devrait aussi lui-même le transformer. Citons, dans un autre passage du Mikhtav MeEliyahou, Rav Dessler qui développe cette idée de manière explicite[3] : « Sanctifier le chabbat, c’est-à-dire le réserver, le séparer quant à la spiritualité de ce jour, c’est cela la définition de « Souviens-toi du jour du chabbat pour le sanctifier ». En sanctifiant le chabbat, l’homme devient lui-même saint (kadosh). C’est l’adhésion à D. la plus intime (dévékout), celle de la dimension « Vous serez saints/séparés ca Je suis saint/séparé ».

[1] Chabbat 118a, traduction personnelle de « kol hameaneg et hachabbat… »

[2] Cité dans Mikhtav MeEliyahou, tome 5, page 265, traduction libre de l’hébreu.

[3] Mikhtav MeEliyahou, tome 2, page 15, traduction libre de l’hébreu. C’est nous qui soulignons.

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