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Synthèse au sujet de la responsabilité de l’adulte face à un enfant qui transgresse un interdit. קטן אוכל נבלות
par: Rav Gerard ZyzekPublié le 11 Février 2025
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I. La Sougia commence dans יבמות קי »ג ע »ב. Tout d’abord la Guemara veut prouver que Rabbi Padat pense que קטן אוכל נבלות אין בית דין מצווין .להפרישו Ensuite la Guemara prouve que Rabbi Yo’hanan n’arrivait pas à trancher cette question. Ensuite la Guemara veut prouver des Psoukim que קטו אוכל נבלות בית דין מצווין להפרישו , mais elle réfute en disant que les versets nous enjoignent de ne pas donner activement aux enfants de ces interdits. Analysons ce passage :
ת »ש לא תאכלום כי שקץ הם לא תאכילום להזהיר הגדולים על הקטנים מאי לאו דאמר להו לא תאכלו לא דלא ליספו ליה בידים תא שמע כל נפש מכם לא תאכל דם להזהיר הגדולים על הקטנים מאי לאו דאמרי להו לא תאכלו לא דלא ליספו להו בידים ת »ש אמור ואמרת להזהיר גדולים על הקטנים מאי לאו דאמר להו לא תיטמו לא דלא ליטמו להו בידים וצריכי דאי אשמעינן שקצים משום דאיסורן במשהו אבל דם דעד דאיכא רביעית אימא לא ואי אשמעינן דם משום דאיכא כרת אבל שרצים אימא לא ואי אשמעינן הני תרתי משום דאיסורן שוה בכל אבל טומאה אימא לא ואי אשמעינן טומאה כהנים שאני משום דריבה בהן מצות יתרות אבל הני אימא לא צריכא.
Le verset dit (Vayikra 11,42) : כל הולך על גחון וכל הולך על ארבע עד כל מרבה רגלים לכל השרץ השורץ על הארץ לא תאכלום כי שקץ הם. « Tout ce qui avance sur son ventre (les reptiles) et tout ce qui avance sur quatre pattes (le scorpion) jusqu’à ce qui a plein de pattes (mille-pattes), toutes les bêtes qui grouillent sur la terre ne les mangez pas car elles sont atroces ». La Guemara rapporte une Beraïta relative à ce verset : לא תאכלום , ne les mangez pas, pour rendre responsables les adultes sur les enfants. Elle veut dire qu’a priori cela a l’air de de dire que si un petit mange quelque chose de non-casher il faudrait l’empêcher, en lui disant : arrête ! ne mange pas ! Rashi explique qu’il n’y a pas un sous-entendu spécial qui nous fasse entendre cet enseignement mais c’est le fait qu’il y a répétition du même interdit plusieurs fois cela nous fait entendre que les adultes son responsables sur les enfants.
Là-dessus la Guemara répond que non. Et que l’insistance du verset nous enseigne qu’un adulte ne doit pas donner franchement avec ses mains à un enfant de l’interdit, mais que si un enfant en mange de lui-même je n’aurais pas d’obligation de l’en empêcher. Oui mais nous voyons que cette insistance est répétée au sujet de l’interdit de consommer du sang et au sujet de l’interdit qu’un Cohen ne se mette en contact d’un mort. Donc si cela est répété au sujet d’autres interdits cela laisse entendre qu’il y a une plus grande insistance et que nous devrions empêcher un enfant si nous le voyons commettre ou manger un interdit. La Guemara réfute, et ainsi est la conclusion, que cette répétition est nécessaire pour les raisons dites dans la Guemara. Par exemple si nous n’avions dit qu’au sujet des bestioles nous n’aurions dit que cette insistance de ne pas donner activement à manger ne s’appliquerait qu’à ce sujet car il a une gravité qui lui est spécifique.
Interrogeons-nous sur cette dernière partie du raisonnement. Si la Torah n’avait pas répété trois fois dans trois sujets différents, j’aurais dit que l’insistance ne serait que par rapport aux bestioles interdites car il y a un aspect grave dans cet interdit (voir Rashi et Tossefot). C’est-à-dire que la Guemara a envisagé que sans cette répétition j’aurais dit qu’il aurait été licite de donner à manger un aliment interdit à un enfant qui n’est pas Bar Mistva. Là-dessus la Torah nous dit que j’aurais dit que l’insistance du verset ne viendrait qu’au sujet des bestioles. De même si la Torah n’avait insisté qu’ua sujet du sang, j’aurais dit que la notion de ne pas donner avec la main à l’enfant ne concernerait que cet interdit qui est condamnable de Karet pour un adulte. Il semble que cette notion de ne pas donner activement à l’enfant signifie que si c’est un interdit grave je ne dois pas galvauder, banaliser cet interdit en en donnant à un enfant. Maintenant nous pouvons comprendre la question fondamentale de la Sougia : קטן אוכל נבלות בית דין מצווין להפרישו או אין בית דין מצווין להפרישו.
La Torah nous donne des Mistvot positives et des Mitsvot négatives. Ces commandements s’adressent à des personnes qui ont ce que notre tradition appelle du Daat, דעת , du discernement. Notre Tradition nous enseigne que ce Daat commence à treize ans pour un garçon et douze ans pour une fille, dans la mesure où la puberté commence chez l’un ou chez l’autre. Moins que cela l’enfant n’est pas responsable dans les commandements de la Torah. Néanmoins il va grandir et va devenir enjoints par ces commandements. La Torah nous montre l’importance de ces commandements et insiste. Si je dis que l’hypothèse de la Guemara de dire qu’il faudrait empêcher l’enfant viendrait du fait que bien qu’il ne soit pas responsable au sens fort des Mitsvot, peut-être que je pourrais dire qu’il y a une trace de responsabilité, comme la notion de חצי שיעור par exemple, alors nous ne pourrions pas comprendre les hypothèses proposées par la Guemara, de dire que si je n’avais dit qu’au sujet des bestioles j’aurais dit a priori qu’un autre interdit il serait permis de le donner avec ses mains à l’enfant. Il ressort que la lecture est la suivante : si la Torah t’interdit quelque chose je ne dois pas banaliser cet interdit et en donner activement à un enfant, ou bien peut-être de dire que si cet interdit est important je dois intervenir si je vois un enfant juif le transgresser. Quoi qu’il en soit il ressort clairement que cette Sougia ne parle pas d’interdits rabbiniques. Il ressort clairement de la Sougia comme la démarche du Rashba qu’il serait permis de donner avec ses mains à manger à un enfant quelque chose d’interdit de manière rabbinique. Maintenant tu pourrais me rétorquer en me disant que même dans les interdits rabbiniques se trouve sous-entendu l’interdit de la Torah de לא תסור , de ne pas nous détourner des paroles de nos Maîtres, toutefois nous voyons clairement des réponses de la Guemara dans 114a que même si nous disons que קטן אוכל נבלות בית דין מצווין להפרישו s’il s’agit d’un interdit rabbinique on n’a pas l’obligation de l’empêcher.
Mais Rambam, Hilkhot Maakhalot Assourot chapitre 17, Halakha 27, tranche qu’il est interdit de donner avec la main même un interdit rabbinique à un enfant. Quelle est la source de Rambam ? D’autre part il y a une contradiction dans Rambam lui-même car dans les Hilkhot Shabbat chapitre 24, Halakha 11 il dit que si un enfant fait un travail interdit de manière rabbinique le Shabbat le Beth Din n’est pas enjoint de l’empêcher. Ceci laisse entendre que si ce serait interdit par la Torah le Beth Din devrait intervenir. Or dans le chapitre 17 des Maakhalot Assourot Rambam dit que même si le petit fait un travail interdit par la Torah le Shabbat le Beth Din n’est pas enjoint de l’empêcher, c’est donc une grande contradiction.
Le Maguid Mishné sur le chapitre 24 pose cette question et reste sur cette question. Rabbi Yossef Caro dans le Kessef Mishné répond que Rambam parle d’interdit rabbinique par rapport à la seconde proposition de cette Halakha qui est que si c’est une Melakha rabbinique et que le père ne réagit pas on laisse le père. Par contre le sous-entendu est que si c’est un travail interdit par la Torah et que le père n’intervient pas on intervient auprès du père, et non auprès de l’enfant. Le Shilté Guiborim sur Shabbat 121a répond que ce que dit Rambam que sur un travail rabbinique on n’intervient pas si l’enfant le fait c’est une manière tranchée de s’exprimer. Car si c’est un travail interdit d’après la Torah et que l’enfant le fait pour l’adulte alors l’adulte doit réagir. Par contre si c’est interdit rabbinique même si l’enfant le fait pour l’adulte, celui-ci n’a pas l’obligation de réagir. Rabbi Yossef Caro dans le Shoul’han Aroukh אורח חיים סימן שמ »ג rapporte telles quelles les paroles de Rambam et dit qu’il est interdit de donner avec les mains un interdit rabbinique à un enfant.
II. Analyse des preuves de Rashba pour dire qu’il n’y a pas d’interdit de donner avec ses mains un interdit rabbinique à un enfant.
a) La Guemara (Yévamot 114a) veut apporter une preuve à l’opinion qui pense que קטן אוכל נבלות אין בית דין מצווין להפרישו à partir de l’enseignement suivant : ‘Que l’homme ne dise pas à un enfant : amène-moi ces clefs, amène-moi ce sceau, mais il le laisse cueillir et il le laisse lancer.’ L’hypothèse de lecture de la Guemara est qu’il est interdit de dire explicitement à un enfant de porter quelque chose dans le domaine public, néanmoins s’il le fait de lui-même et qu’il jette quelque chose dans le domaine public ou cueille quelque chose on le laisse faire. D’où nous apprendrions que si un enfant mange quelque chose qui n’est pas cachère on le laisse faire. La Guemara réfute en disant : אמר אביי תולש בעציץ שאינו נקוב זורק בכרמלית דרבנן. ‘Abayé répond : ce n’est pas une preuve, nous pouvons dire que lorsqu’on laisse l’enfant jeter ou cueillir, c’est jeter quelque chose dans un Carmélit, c’est-à-dire un domaine où sortir un objet n’est interdit que rabbiniquement, et cueillir d’un pot de fleurs qui n’a pas de trou en bas, pour lequel l’interdit de cueillir le jour de Shabbat ne l’est que rabbiniquement. Il ressort explicitement de la Guemara que même d’après l’opinion qui pense que si un enfant transgresse un interdit le Beth Din doit intervenir, ceci ne s’appliquera que pour un interdit de la Torah et non pour un interdit rabbinique. Le Rashba déduit de là le raisonnement suivant. Nous voyons que pour l’opinion qui pense que l’on doit intervenir si l’on voit un enfant transgresser un interdit, s’il s’agit d’un interdit rabbinique nous descendons d’un niveau et n’avons pas l’obligation d’intervenir. Si c’est ainsi que les Maîtres du Talmud abordent les choses, d’après la conclusion légale que l’on n’a pas à intervenir même pour un interdit de la Torah, mais que néanmoins il est interdit de donner activement à un enfant de manger un interdit, pour un interdit rabbinique nous descendrons un niveau et il sera licite de le donner à manger à un enfant. Ceci est un raisonnement, mais comme tout raisonnement il est possible de dire le contraire. Le Rashba va apporter maintenant des preuves textuelles.
b) Dans la Guemara Shabbat 139a il est question de savoir est-ce qu’il est permis de semer le végétal appelé Kishout dans une vigne à titre de l’interdit de Kelaé HaKerem, de planter des légumes avec de la vigne. Ce végétal fait l’objet d’un débat. Et la Halakha est qu’il est interdit de mélanger le Kishout avec de la vigne en terre d’Israël. Hors d’Israël nos Maîtres nous enseignent que chaque fois qu’il y a une discussion dans les lois relatives à Kélaïm la conclusion légale est comme l’avis qui allège. Dans le sujet qui nous occupe Rabbi Tarphon permet de semer du Kishout avec de la vigne bien que Rabbi Tarphon. Néanmoins la Guemara nous enseigne que, comme les gens ne sont pas des connaisseurs, il vaut mieux interdire hors d’Israël bien qu’il y ait un avis, celui de Rabbi Tarphon, qui permette. La Guemara donc prend acte de cette interdiction de semer même hors d’Israël de la vigne avec du Kishout. Néanmoins la Guemara nous enseigne que Rav Masharshia donnait une pièce à un enfant non-juif pour qu’il le fasse, et qu’il sème du Kishout avec de la vigne. La Guemara demande : mais pourquoi n’a-t-il pas demandé directement à un enfant juif ? La Guemara répond que l’enfant juif risque d’être entrainé par cette habitude (et continuer de le faire lorsqu’il sera grand). Le Rashba demande : mais quelle est cette question, ‘mais pourquoi n’a-t-il pas demandé directement à un enfant juif ?’. Quelle est l’hypothèse ? Nous pouvons déduire d’ici que les ‘Hakhamim n’ont pas institué d’interdit de faire faire un interdit rabbinique à un enfant. Le Rashba, dans ses Teshouvot ( חלק א’ סימן צ »ב ) s’objecte à lui-même en disant que la Guemara réfute en disant : אתי למיסרך , ‘il va prendre l’habitude’, ce qui signifie que finalement l’on ne demande pas à un enfant Israël de semer du Kishout avec de la vigne car si on lui demande il va prendre l’habitude pour plus tard lorsqu’il sera grand, donc il est interdit de donner explicitement à un enfant un interdit rabbinique ! Le Rashba répond que cette notion de אתי למיסרך , ‘il va prendre l’habitude’, ne s’applique que lorsqu’on lui demande de faire quelque chose pour le besoin de l’adulte. Par contre si c’est pour le besoin de l’enfant c’est permis. La preuve en est la Tossafta ( ‘ יומא פרק ד’ הלכה ה ) où Shamaï ne voulait pas donner à manger à son enfant à Yom Kippour même avec une main. Et les ‘Hakhamim ont décrété à son sujet qu’il donne à manger à son enfant avec ses deux mains. C’est-à-dire que dans un cas de besoin de l’enfant mineur il n’y pas la notion de אתי למיסרך , ‘il va prendre l’habitude’. Néanmoins il est possible de réfuter la preuve du Rashba en disant que ce cas de semer du Kishout avec de la vigne est un cas d’espèce où il n’y a pas d’interdit rabbinique véritable, seulement une conduite à tenir dans un contexte où les gens risquent de ne pas comprendre que fondamentalement c’est permis. De même Tossefot ( מסכת שבת דף קל »ט ע »א דה »מ וליתן ) disent qu’ils ont reçu par tradition que l’opinion qui propose de dire à un enfant de semer le mélange est celle de Rav A’ha ben Yaakov qui dit dans le Traité Eirouvin 40b que l’on dise la Beraïta de שהחיינו sur un verre de vin le soir de Yom Kippour et que l’on donne à un enfant à goûter de ce vin. Le contexte de Yom Kippour est là aussi spécifique en cela que fondamentalement il n’y a aucun interdit pour un enfant de manger à Yom Kippour et même il faut que les enfants se nourrissent. (Sur un sujet connexe voir la Sougia dans Rosh HaShana 33a et b אין מונעין את התינוקות מלתקוע et טור אורח חיים סימן תקפ »ח et (ערוך השלחן אורח חיים סימן תקפ »ט ס »ק י »א
III. La Sougia commence dans Yévamot 113b avec le cas de Rav Yits’hak ben Bisna qui a égaré les clefs du Beth HaMidrash dans le domaine public le jour de Shabbat. Il vient devant Rabbi Padat et lui demande que faire. Celui-ci lui dit d’envoyer les enfants se promener dehors, sachant que s’ils trouvent les clefs ils les ramèneront aux adultes. La Guemara affirme : nous voyons de cette réponse de Rabbi Padat qu’il pense que קטן אוכל נבלות אין בית דין מצווין להפרישו . Depuis toujours je suis perplexe face à cette déduction car il y a une différence majeure entre le cas où je vois un enfant manger quelque chose qui n’est pas Casher et le cas où finalement j’incite implicitement un mineur à transgresser un interdit de la Torah ! Cette remarque est abordée par le Rashba dans ses ‘Hidoushin sur Yévamot et le Méiri sur Nidda 46b : La Guemara dans Nidda se demande si la notion de מופלא סמוך לאיש est une notion de la Torah ou une notion rabbinique. Pour trancher cette question la Guemara amène une Beraïta où l’on voit qu’une fille mineure qui a été mariée par sa mère ou son grand frère à quelqu’un et que cette mineure ait fait un Nédèr, un voeu, en étant dans l’année précédant la Bat Mistva, le mari qui lui est marié rabbiniquement est habilité à effacer ce voeu. Si tu dis que מופלא סמוך לאיש est une notion rabbinique nous comprenons que le mari qui lui est marié rabbiniquement puisse effacer ce voeu, mais si tu dis que מופלא סמוך לאיש est une notion de la Torah, comment peux-tu dire que le mari ait la capacité d’effacer un voeu qui a effet d’après la Torah ? La Guemara répond que même si tu dis que ce voeu ait effet d’après la Torah néanmoins si le mari efface, quand bien même cela ne serait pas efficace d’après la Torah néanmoins la petite qui mangerait cela après l’intervention du mari rentrerait dans la catégorie de .קטן אוכל נבלות אין בית דין מצווין להפרישו
Le Rashba pose une question qui s’impose : mais dès qu’il dit qu’il efface le voeu c’est comme s’il lui mettait ce que cette femme s’est interdit dans sa bouche, or ce qu’elle s’est interdit reste interdit si nous affirmons que מופלא סמוך לאיש דאורייתא . Or tous les avis pensent qu’il est interdit de mettre quelque chose d’interdit dans la bouche d’un mineur ? Le Rashba répond, et ainsi répond le Méiri sur cette Guemara de Nidda, que placer l’enfant à côté d’un morceau de viande interdite est licite et que cela ne s’appelle pas donner à manger avec ses mains. Il ressort de ce point précis que pour nos Maîtres peu nous importe dans le fond qu’un mineur transgresse ce qui serait pour un adulte un interdit de la Torah. Donc l’inciter de manière détournée à ce qu’il le fasse n’est aucunement un problème, en tout cas d’après l’avis qui pense que קטן אוכל
נבלות אין בית דין מצווין להפרישו . Nous pouvons donc nous demander en quoi consiste l’interdit de donner un interdit dans la bouche d’un enfant, interdit que nous apprenons des versets de la Torah ? Nous proposons de dire dans un premier temps que ce serait une notion rabbinique qui ressemblerait à la notion de אמירה לנכרי ou bien cela entrerait dans le sens de ne pas l’habituer à quelque chose qui lui sera interdit lorsqu’il sera grand. Mais d’après cela qu’en est-il de donner dans la bouche un interdit à une personne qui n’a pas de Daat et que ne peut pas en avoir?
IV. La Guemara dans Yévamot 114a dit que Rabbi Yo’hanan ne tranche pas sur le sujet de .קטן אוכל נבלות
Le Beth Yossef sur אורח חיים סימן שמ »ג suggère de dire que c’est pour cela que ni le Rif ni le Rosh ne rapporte la réponse de la Guemara au nom de Rabbi Yo’hanan au sujet du petit qui vient éteindre l’incendie qu’on l’empêche d’éteindre. Et cela a l’air donc de ressortir que d’après ces décisionnaires même si le petit le faisait pour lui et non pour l’adulte on devrait l’empêcher. Néanmoins le Beth Yossef revient de cette remarque et penche plutôt de dire qu’il est inutile de préciser au niveau de la conclusion légale que l’enfant agit pour son père car en fait l’enfant agit toujours pour l’adulte même si ce n’est pas son père. Le Beth Yossef précise que l’incendie est perçu par l’enfant comme quelque chose qui est un intérêt pour l’adulte, tandis que les clefs perdues dans la rue, l’enfant les prend et les amène, il ne perçoit pas que c’est comme si l’adulte lui avait dit de le faire.
V. Voir le Tour dans יורה דעה סימן שע »ג כשם שהכהן מוזהר שלא ליטמא כך הוא מוזהר להזהיר הקטנים מליטמא, וכתב הרמב »ם שאין הגדולים מוזהרים על הקטנים אלא שלא לטמאותם ביד אבל אם בא ליטמא בעצמו אין בית דין מצווין להפרישו אלא שאביו מצווה לחנכו בקדושה ונראה לי שצריכין להפרישו וכן משמע הלשון שדרשו אמור ואמרת להזהיר גדולים על הקטנים משמע שצריך להזהירם מליטמא.
Nous sommes ici en présence d’une discussion étonnante. En effet il ressort clairement de la Guemara que la notion de להזהיר גדולים על הקטנים dont parlent les différentes Beraïtot rapportées dans Yévamot 114 a et b ne parle que de rendre impur l’enfant activement. Comment Rabbénou le Tour peut-il dire que cela parle d’empêcher l’enfant de fauter, de se rendre impur ici en l’occurrence ? D’autant plus que Rambam rapporte la conclusion de la Guemara de manière évidente (sauf que Rambam parle d’une notion annexe : le fait que le père ait l’obligation d’éduquer son enfant, notion sur laquelle le Rashba s’oppose). Voir le Beth Yossef qui analyse ce problème dans .אורח חיים שמ »ג Le Beth Yossef pose donc la question : étant donné que le Tour tranche la Halakha que קטן אוכל נבלות אין בית דין מצווין להפרישו et que le Shass pose en question à cet avis à partir de cette Beraïta et que la Guemara répond d’après cette opinion que la Beraïta ne vient qu’interdir de rendre impur par les mains, comment le Tour peut-il trancher comme l’hypothèse ? Rabbi Yossef Caro répond que la lecture première de la Beraïta qui dit להזהיר גדולים על הקטנים laisse entendre que l’on dirait à l’enfant : arrête ! ne mange pas de cela ! Et si l’on apprend d’une seule source cela devient un בנין אב et l’on généraliserait à tous les interdits, donc קטן אוכל נבלות בית דין מצווין להפרישו . Ce qui est une question contre le sens dans lequel la Guemara a l’air d’aller. Là-dessus la Guemara réfute en disant que cette responsabilité envers l’enfant n’est que de ne pas lui donner à manger de cet interdit de manière active, avec les mains. La Guemara rapporte trois sources pour lesquelles nous apprenons des versets להזהיר גדולים על הקטנים , donc s’il n’y avait qu’une source nous dirions qu’effectivement cela nous apprendrait que d’après la Torah il est interdit à un adulte de donner à manger à un enfant quelque chose d’interdit. Mais étant donné que cela est répété cela nous enseigne que nous devons l’empêcher de transgresser ce qui est un interdit pour un adulte. La Guemara réfute en disant que ces trois sources sont nécessaires et que nous restons sur le point que nous apprenons de ces trois versets qu’il est interdit de donner franchement à un enfant quelque chose d’interdit avec les mains. Telle est la conclusion de la Guemara. Comment donc notre Maître le Tour peut-il dire qu’il y a une obligation d’empêcher un enfant Cohen de se rendre impur ? Rabbi Yossef Caro propose d’expliquer la démarche du Tour de la manière suivante. Il y a une insistance du verset qui nous enseigne que l’adulte est responsable de l’enfant, est-ce à dire qu’il doit lui dire : arrête ! להפרושי מאיסורא ?
Là-dessus la Guemara répond que non et que l’insistance du verset vient nous dire que l’adulte ne doit pas donner de l’interdit à l’enfant avec ses mains. A priori si j’ai une source à cela je dois généraliser à titre du principe de Binian Av, principe de généralisation. Mais il y a encore une autre source, alors on ne peut pas généraliser. La Guemara répond que si car il y a une nécessité à ces deux sources. Donc généralisons. Mais il y a une troisième source, donc on ne peut pas généraliser. Mais si c’est ainsi il y a une impasse. Car il ressortirait qu’on n’a pas le droit de donner par la main un interdit à un enfant que pour ces trois cas précis. Ce qui impliquerait que pour les autres interdits de la Torah ce serait licite de donner un interdit par la main à un enfant. Le Beth Yossef dit que ce serait absurde et qu’il n’y a jamais eu une telle hypothèse. Nous sommes obligés de dire que c’est le contraire. Pour tous les interdits il est interdit de donner par la main un interdit à un enfant. Par contre pour ces trois interdits ce sont des exceptions et nous devrons intervenir pour leur dire de ne pas faire ces interdits. Il y a un problème à cette démarche car la Guemara dit clairement que ces trois sources sont nécessaires et que nous pouvons généraliser. Le Beth Yossef décortique ce raisonnement et propose de dire qu’il ne vient que pour réfuter cette thèse. Et qu’en vérité si l’on relit le sujet on peut remettre les choses à plat et dire que s’il fallait généraliser la Torah aurait dû enseigner qu’on ‘na pas le droit de donner avec ses mains un interdit à un enfant à partir de l’interdit de Névéla et l’interdit d’impureté. J’aurais dit que l’interdit est dit dans Névéla qui est un interdit qui concerne tout le monde et aussi dans un interdit qui ne concerne que les Cohanim. Pourquoi donc la Torah spécifie-t-elle les trois interdits cités par la Guemara ? C’est pour nous dire que seulement ces interdits on doit empêcher l’enfant de transgresser. Et qu’on ne peut pas généraliser. Telle est la démarche magnifique du Beth Yossef. De plus, dit le Beth Yossef, l’expression de la Beraïta להזהיר גדולים על הקטנים va plus dans le sens d’une responsabilité d’empêcher de se rendre impur, ou de manger du sang ou des bestioles interdites. Le Nimouké Yossef d’ailleurs dans les lois d’impureté dit comme le Tour ‘ הלכות טומאה אדה »מ תניא
VI. Y a-t-il une différence entre la responsabilité du Beth Din et la responsabilité du père à l’égard de l’enfant ? Nous avons rapporté au premier paragraphe de cette étude le langage de Rambam à la fin de ses Hilkhot Maakhalot Assourot où il tranche que le Beth Din n’est pas responsable d’empêcher un enfant qui mange de la viande non-cashère. Voici le langage de Rambam dans la Halakha 28 : אע »פ שאין בית דין מצווין להפריש את הקטן מצוה על אביו לגעור בו ולהפרישו כדי לחנכו בקדושה שנאמר חנוך לנער על פי דרכו וגו’ . ‘Bien que le tribunal n’ait pas l’obligation d’empêcher un enfant (de consommer un interdit ou de profaner Shabbat), néanmoins le père est ordonné de le gronder et de l’empêcher pour l’éduquer dans la sainteté, comme dit le verset (Mishlé 22,6) « Eduque l’enfant selon son chemin ».’ Rambam innove qu’indépendamment de la responsabilité collective ou de la non-responsabilité collective à l’égard de l’enfant, incombe au père le commandement d’éduquer son enfant. Nous avons un principe que la notion de חינוך , de ‘Hinoukh, d’éducation, ne s’applique qu’au sujet des commandements positifs de la Torah. Ce qui aurait comme conséquence que même le père n’aurait pas l’obligation de gronder son fils s’il mange de sa propre initiative quelque chose de non-casher. Cependant Rambam innove qu’il y a dans ce sujet un aspect lié à un commandement positif, c’est la notion d’éduquer son enfant à la Kedousha, à la sainteté. A priori cette notion d’éduquer à la Kedousha ne concernerait que l’attitude par rapport aux aliments interdits. De cette manière nous pouvons répondre à la question cinglante de Rashba à partir de la Guemara de Niddah 46b. Rav Houna veut dire qu’un enfant dans l’année juste avant la Bar Mitsva est habilité à faire un נדר , un Nédèr, un voeu, et que ce Nédèr a force de loi en vertu de la notion de מופלא סמוך לאיש , de Moufla Samoukh LeIsh. Ce qui a comme conséquence que si l’enfant a fait un Hékdèsh, a voué quelque chose au Temple, et l’a mangé, il reçoit flagellation. Ceci est une innovation très importante car un petit a priori n’est pas considéré mature donc ne peut d’aucune manière être condamnable en pénal. L’innovation de Rav Houna est qu’étant donné que la Torah donne une capacité à l’enfant de percevoir l’impact de ce qu’est sa parole, cela implique donc que sur ce point précis il serait condamnable en pénal s’il transgresse sa parole. Rav Houna bar Yéhouda amène une preuve pour Rav Houna à partir de la Beraïta suivante : לפי שמצינו שהשוה הכתוב הקטן כגדול לזדון שבועה ולאיסר ולבל יחל יכול יהא חייב על הקדשו קרבן ת »ל זה הדבר קתני מיהת לאיסר ולבל יחל חייב . ‘Nous trouvons que la Torah met sur le même plan l’enfant et l’adulte au sujet de l’interdit de transgresser sciemment un serment, une Shevouah, שבועה , de même pour l’interdit et l’interdit de ne
pas profaner son Nédèr. Serait-ce alors qu’il serait condamnable s’il profitait par erreur d’un Hékdèsh qu’il aurait sanctifié ? Là-dessus le verset exclut en vertu du verset (Bamidbar 30,2) « voici la chose ». Nous voyons a minima de cette Beraïta que l’enfant transgresserait l’interdit de profaner sa parole. Donc c’est une preuve pour Rav Houna.’ Il y a deux niveaux. Un enfant voue par sa parole quelque chose au Hékdèsh. Ceci a un statut de Hékdèsh et il est interdit d’en profiter. Mais cela n’implique pas forcément que s’il en profite il transgresse lui-même un interdit car somme toute il est mineur. La Beraïta nous enseigne qu’il est comme l’adulte par rapport à l’interdit. Ceci serait alors une preuve pour Rav Houna. La Guemara réfute cette preuve : אימא לאיסור בל יחל ‘Lisons dans la Beraïta : l’enfant et l’adulte sont sur le même plan pour un interdit de ne pas profaner son Nédèr’ c’est-à-dire que l’enfant, comme l’adulte a une sorte d’interdit dans le Nédèr qu’il a proféré, mais pas un interdit au sens fort de manière à ce qu’il soit condamnable en pénal s’il l’a profané.
La Guemara conteste cette lecture : איסור בל יחל מה נפשך אי מופלא סמוך לאיש דאורייתא מילקא נמי לילקי ואי מופלא סמוך לאיש לאו דאורייתא איסור נמי ליכא
‘Un interdit de ne pas profaner son Nédèr ? De deux choses l’une, soit Moufla Samoukh LeIsh est une notion d’après la Torah, à compte-là l’enfant devrait recevoir flagellation s’il profane son Nédèr, soit Moufla Samoukh LeIsh n’est pas une notion d’après la Torah, alors quel interdit y aurait-il ?’ La Guemara répond, et là se trouvera le point que le Rashba analysera : לאותן המוזהרים עליו שמע מינה קטן אוכל נבלות ב »ד מצווין עליו להפרישו. ‘Effectivement, nous sommes d’accord que la Beraïta ne parle pas de l’interdit par rapport à l’enfant qui n’est pas encore responsable par rapport aux Mitsvot mais elle parle de la responsabilité des adultes à son égard. Mais si c’est ainsi cela impliquerait-il que si un enfant transgresse un interdit le Beth Din devrait-il l’en empêcher ?’ c’est-à-dire que la Guemara authentifie qu’un enfant dans l’année qui précède sa Bar Mitsva est habilité à interdire par sa parole quelque chose, et son Nédèr a force de loi. Néanmoins s’il profane sa parole il n’est pas condamnable. Alors que veut dire la Beraïta en disant que l’enfant est sur le même plan que l’adulte par rapport à ces interdits ? La Guemara répond que la Beraïta veut dire que les adultes qui sont responsables de cet enfant transgressent un certain interdit s’ils laissent l’enfant enfreindre son interdit qu’il a créé par sa parole. Mais la Guemara n’est pas satisfaite par cette réponse car si l’on donne cette lecture dans la Beraïta cela impliquerait que, si un enfant transgresse un interdit, le Beth Din serait responsable de l’empêcher, or il ressort de l’ensemble du sujet que la conclusion serait le contraire ! La Guemara donnera donc une nouvelle lecture de la Beraïta compatible avec la conclusion légale que si un enfant mange quelque chose d’interdit le Beth Din n’a pas l’obligation de l’en empêcher. Le Rashba demande : si nous disons comme Rambam que le père a une responsabilité spécifique par rapport à son fils, la Guemara aurait dû répondre que l’interdit dont parle la Beraïta ne concerne pas tout un chacun mais concerne le père et qu’il n’y aurait pas à déduire d’ici quoi que ce soit concernant le débat si le Beth Din a l’obligation ou non d’empêcher un enfant de transgresser un interdit. Donc si la Guemara ne répond pas ainsi ceci signifie que le père est au même niveau que tout un chacun dans la responsabilité face à un enfant qui transgresse un interdit, ce qui serait une question cinglante contre Rambam. Le Rashba dit qu’au niveau de l’analyse on comprendrait que le père ait l’obligation d’empêcher son enfant de commettre ce qui serait un interdit pour lui lorsqu’il sera grand. En effet si déjà le père a l’obligation d’éduquer son enfant aux commandement positifs raison de plus qu’il le devrait par rapport aux commandements négatifs. Mais si c’est ainsi comment rendre compte de cette Guemara du Traité Nida 46b ? Force est de conclure, dit le Rashba, que l’obligation de ‘Hinoukh ne concerne que les commandements positifs. Ce qui a priori est contraire à la démarche de Rambam. Néanmoins il nous semble qu’il n’y aucune question contre Rambam. Celui-ci dit que le père a l’obligation d’empêcher son enfant de manger des aliments interdits car il a l’obligation d’éduquer son enfant dans la Kedousha, ce qui est le commandement positif de Kedoshim Tiyou. Par contre les interdits dont il est question dans Nida 46b concernent l’interdit de ne pas profaner sa parole, ce qui est d’un autre ordre.
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