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Parachat Vaye’hi – La paix

par: Jaqui Ackermann

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Notre paracha cite les bénédictions adressées par Yaakov à ses douze fils, à la fin de sa vie.

Dès l’annonce que Yaakov est malade, Yossef va le voir avec ses deux fils. Notre paracha cite les bénédictions adressées par Yaakov à ses douze fils, à la fin de sa vie.

Dès l’annonce que Yaakov est malade, Yossef va le voir avec ses deux fils. A ce moment là, Yaakov bénit Yossef et ses fils. Puis Yaakov va bénir Yossef avec tous les autres enfants.

On peut se demander pourquoi Yossef est béni deux fois.

La première fois que Yossef est béni, Yaakov dit auparavant : Ephraïm et Menaché sont pour moi comme Réouven, et Chim’on. Et après cela il bénit Yossef à travers ses fils puisqu’on ne parle que d’eux.
On peut donc dire que Yossef est béni d’abord indirectement, puis plus tard directement avec tous ses frères. Mais cela ne résout pas la question car si Yossef est remplacé par ses deux fils, il suffirait de les bénir eux deux, et on n’aurait plus besoin de bénir Yossef par la suite. On voit qu’il est tout de même béni plus tard, donc nous restons avec cette question de cette double bénédiction.

Yaakov déclare que les deux fils de Yossef sont considérés comme ses propres fils. La Guemara Horayot 6b enseigne que ce n’est pas un changement total : la tribu de Yossef existe encore. Par exemple, nous savons que sur le ‘hochen (le pectoral) du Cohen Gadol, il y avait douze pierres précieuses, une pour chaque tribu. Et c’est le nom de Yossef qui y figure, pas celui de Menaché et Ephraïm. C’est seulement dans le partage d’Erets Israël qu’il y aura deux parts de terrain : une pour Ephraïm et une pour Menaché. La Guemara conclut que Yaakov, lorsqu’il annonce que Menaché et Ephaïm seront comme ses fils, ne parle que d’héritage.

Un verset de Divré Hayamim I (chapitre V, verset 1) déclare que le droit d’aînesse a été retiré à Réouven à cause de sa faute (lorsqu’il a retiré les affaires de son père de la tente de Bilha pour les mettre dans la tente de sa mère Léa), et a été octroyé à Yossef. Selon la Guemara, Yossef a reçu deux parts de terrains en Erets Israël, car il a un statut d’aîné, qui lui donne droit à une double part. Mais cela n’explique pas pourquoi il fallait dire que Ephraïm et Menaché soient comme Réouven et Chim’on. Yaakov aurait pu simplement dire que Yossef bénéficie de deux parts, sans créer deux nouvelles tribus.

On peut répondre de la manière suivante, en s’inspirant de plusieurs commentateurs (notamment les Réchimot du Pa’had Yits’hak, Soukot).

Si Yaakov voit ses petits-fils comme ses propres fils, c’est que Yossef a si bien imité son père que ses fils se confondent avec lui même. Les ‘Hakhamim disent que l’on peut parfois considérer ses petits-fils comme ses fils. C’est ce qui se passe effectivement ici. En d’autres termes, le fait de changer de génération ne change pas la transmission et l’éducation. Yossef a intégralement transmis l’héritage de Yaakov à ses propres fils. C’est là que réside une des forces de Yossef. Le texte dit clairement que bénir les fils de Yossef, c’est comme bénir Yossef lui-même : il y a identité entre les générations. Non pas que Yossef n’existe pas, mais Yossef préserve totalement l’héritage des Avot.

Nous avons hérité des Avot des qualités qui sont en nous, et aussi Erets Israël. Et quand il s’agit de l’héritage des Avot, alors Yossef nous montre sa force, et ses fils sont comme des fils directs de Yaakov. C’est pour cela qu’ils sont comme deux tribus.

On peut alors expliquer pourquoi Yossef a été béni deux fois.

Lorsque l’on bénit quelqu’un, on lui souhaite de développer tout le bien qui est en lui. Chacun des fils de Yaakov a des qualités particulières, et Yaakov s’adresse à chacun pour le bénir. Mais Yossef a une qualité qui n’a pas d’égal parmi ses frères et c’est pour cela qu’il est nécessaire de le bénir à part. Yaakov s’adresse à lui par rapport à cette force particulière : le fait que la distance de générations n’altère pas ce que les Avot nous ont transmis. Pour cette qualité là, Yaakov bénit Yossef en bénissant ses enfants. Et il lui souhaite que cette bénédiction soit celle utilisée par tous les Juifs pour bénir leurs enfants. Car cette qualité de Yossef est nécessaire à tous. Nous souhaitons tous en hériter.

La capacité de transmettre intégralement sa tradition implique également une autre qualité. Tous les éléments positifs qu’une personne reçoit ou acquiert vivent en son sein. Mais il peut arriver qu’un des éléments bouscule ou gêne un autre. Toutes les qualités de l’être ne peuvent pas forcément s’exprimer chacune en son temps, en gardant chacune sa place. Ce que la tradition appelle « chalom », c’est cette faculté de laisser chaque point positif, que cela soit dans la personnalité, dans la famille, dans la société… s’exprimer pleinement, sans jamais s’altérer ou altérer autre chose. C’est pourquoi chalom est proche de chalém (= entier). On comprend aisément pourquoi nos Sages disent que le chalom est le seul réceptacle adapté aux bénédictions. Car sans lui, les bénédictions se retrouvent limitées. Et on peut aussi comprendre pourquoi c’est l’objet de la dernière bénédiction de la ‘amida. La paix, pour les hommes, est souvent synonyme de compromis, de laisser-faire, de silences, cela s’apparente plus à une forme de pacification qu’à une vraie paix.

Le chalom est ainsi une des qualités de Yossef qui sait donner à chacun sa juste place, qui sait préserver la richesse d’un patrimoine spirituel, qui sait transmettre sans oublier.

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