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Parachat Vaethanan

par: D. Scetbon

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La paracha de Vaethanan se caractérise, entre autres, par le fait qu’elle contient la répétition des Dix Paroles déjà énoncées dans la paracha de Yitro. La paracha de Vaethanan se caractérise, entre autres, par le fait qu’elle contient la répétition des Dix Paroles déjà énoncées dans la paracha de Yitro. La troisième de ces paroles est la suivante : « Tu n’élèveras pas le nom de l’Eternel ton D. en vain. »

La Guemara, dans le premier chapitre du traité Baba Metsia (5b), décrit le cas suivant : lorsque deux personnes font simultanément une trouvaille, chacune revendiquant être la première à l’avoir trouvée, et qu’il faut les départager, on partage la valeur de l’objet trouvé entre les deux protagonistes. Cependant, préalablement, chacun d’entre eux devra jurer « ne pas être propriétaire de moins de la moitié du bien ».[[Cf. sur place les raisons de cette formulation du serment.]]

La Guemara explique que ce serment a été institué afin d’éviter que tout un chacun ne se saisisse du bien d’autrui, n’en revendique la propriété et ne s’empare de la moitié. Ce type d’appétit va être réfréné par le serment.

Nous constatons donc que pèse sur chacun d’entre eux une sorte de « soupçon » qu’il est capable de revendiquer un bien sur lequel il n’a aucun droit.

En ce cas, dit la Guemara, pourquoi ne pas faire peser le même soupçon sur son serment ? En d’autres termes, celui qui est capable de voler est tout aussi capable de se parjurer. A cela la Guemara répond : « Non, l’individu soupçonné de l’une de ces transgressions n’est pas pour autant soupçonné de l’autre ».

Tosfot propose d’en expliquer la raison : « Il semble que la raison est que le serment est un acte grave, car ainsi que nous le voyons dans le traité Yoma et Chvouot la terre a tremblé lorsqu’Hachem a prononcé au Sinaï l’interdiction de proférer un serment en vain. »

Il nous faut donc essayer de comprendre le sens du texte cité par Tosfot. Que signifient les termes « la Terre a tremblé » et pourquoi cette expression est-elle utilisée à propos de ce commandement ?

Le Maharal de Prague par deux fois dans son œuvre analyse ce texte.[[Cf. notamment Hidouché agadot sur place.]] Pour lui, le serment comporte deux facettes :

– D’une part c’est un acte empreint d’une certaine grandeur. En effet celui qui prononce un serment doit utiliser le Nom divin. Lorsqu’un homme fonde sa crédibilité de cette manière, il reconnaît explicitement le D. Un. Celui-ci devient sa référence fondamentale, l’ancrage d’une parole qui se veut vraie.

– Mais d’autre part lorsque cet homme qui se place face à D. fait un faux serment, il porte atteinte de manière frontale à l’honneur du D. que pourtant il vient lui-même de reconnaître.

Peut-être que ce texte du Maharal peut s’expliquer ainsi : la Chevoua (serment) est une expression d’une certaine forme de proximité, d’intimité avec D. A l’intérieur de ce type de relation le mensonge prend un tout autre relief.

Le Maharcha (sur Chvouot 39a) a une lecture un peu différente :

– Il explique dans un premier temps l’expression « la terre a tremblé » comme suit : le monde a été créé par la voie du Nom divin, celui-ci est en quelque sorte inscrit dans la structure de la Création. Pour dire cela autrement, l’univers est sous-tendu par la volonté de D. Le faux serment, qui suppose la prononciation du Nom est une atteinte à ce fondement. C’est ce que nos Maîtres veulent signifier par « la terre a tremblé ».

-Il ajoute à cela un second élément d’analyse. « Celui qui profère un faux serment porte atteinte au Palais d’en Haut ». Cette expression bien particulière est utilisée par les Sages dans un autre contexte, qui permettra peut être de percevoir l’idée soulevée par le Maharcha.

La Guemara dans le traité Houlin (7b) rapporte l’enseignement suivant, au nom de Rabbi Yohanan:
והאמר ר’ יוחנן למה נקרא שמן כשפים שמכחישין פמליא של מעלה
« Rabbi Yohanan dit : pourquoi les sorciers sont il appelés [dans la Torah] Kechafim, parce qu’ils contredisent le Palais d’En Haut ». Ce texte est particulièrement difficile à traduire. En effet la Guemara donne une source non étymologique mais plutôt homilétique du terme « Kechafim », elle a recours pour cela à une méthode dite du « notarikon ». Le mot « Kechafim », une fois « étiré » selon cette méthode très particulière, devient « Makhichim pamalia chel maala » c’est à dire «contredisent le Palais d’En Haut».

Les Sages nous disent ici, qu’un sorcier ne vient pas nier l’existence de D., mais utiliser les règles édictées par Lui dans le monde, à son propre profit. Il détourne les mécanismes de l’univers,mais ne les remet pas en cause. C’est cette même expression qu’utilise le Maharcha sur le texte de Chvouot. Peut être cela nous aide-t-il à mieux saisir ce texte.

L’auteur d’un serment vain assume l’existence de D., mais il est, en quelque sorte, assez cynique pour tenter de détourner Sa création à son profit. C’est la raison pour laquelle cette faute est si grave. C’est également ce qui explique que la Guemara de Baba Metsia ne considère pas qu’un homme capable d’un vol soit capable de se parjurer. Faire une faute est une chose, manipuler en est une autre.

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